Entre deux guerres. Souvenirs sur la IIIe République
Le deuxième tome de Souvenirs sur la IIIe République, de Joseph Paul-Boncour, a suivi de près le premier ; il possède les mêmes qualités que son devancier et, sous une forme agréable, retrace d’importants événements, dans lesquels l’auteur a joué souvent un rôle d’observateur bien placé, ou d’acteur de premier plan. Le volume a trait à la période qui s’étend depuis les dernières guerres, plus précisément depuis l’arrivée du Président Wilson à Paris, jusqu’en 1936. Fort intéressants sont ses impressions à son retour du front en 1918, et les souvenirs qu’il évoque de la chambre bleu horizon et de l’opposition de ses camarades socialistes. Mais la partie qui restera, sans doute, la plus précieuse, pour qui voudra écrire l’histoire de la période d’entre-deux-guerres, est celle qu’il a consacrée à la Société des Nations où, pendant de longues années, il fut l’avocat, aussi compétent qu’éloquent, des intérêts de la France, qui se confondaient avec ceux de la Société des Nations eux-mêmes. À ce propos, nous voyons défiler, sous la plume alerte de M. Paul-Boncour, une série d’esquisses spirituelles et vivantes, des hommes qui parurent alors à Genève et qui s’appelaient : Herriot, McDonald, Henderson, Lord Cecil, Politis, Pilsudski, Titulesco, le comte Bernsdorff, Litvinoff, André Tardieu, et. Il met également en relief les travaux déployés par la France pour réaliser sa foi et son idéal du désarmement, ainsi que la sécurité collective, grâce à la création d’une force internationale, dont la lucidité d’un André Tardieu avait reconnu l’absolue nécessité.
Le rôle de Joseph Paul-Boncour grandit encore, quand il devient Président du Conseil, du reste pour peu de temps, et ministre des Affaires étrangères, qu’en cette qualité il s’efforça de resserrer les liens de la France avec ses Alliés de l’Europe centrale, et de parer au danger, qu’il devinait mortel pour l’Europe, créé par le départ de l’Allemagne nationale-socialiste, de la Société des Nations.
Malgré le désir très naturel, chez un auteur de cette qualité, de présenter son œuvre sous un jour favorable, il ne parvient pas cependant à dissimuler l’angoisse que lui causa, dans les années qui précédèrent la guerre, cette ascension de l’Allemagne, jointe au renoncement et à l’incompréhension de certains partenaires de la France, sans parler des trop nombreuses faiblesses du régime de politique intérieure de celle-ci.