Histoire des populations françaises / Histoire de la pensée européenne. T. I : l’éveil intellectuel de l’Europe / Histoire d’une démocratie : Athènes
Réédition revue et abrégée d’un livre pionnier de l’histoire démographique paru en 1948, cette Histoire des populations françaises n’a rien perdu de son intérêt : c’est que cette étude relève plus de l’histoire des mentalités que d’une histoire proprement démographique. Mieux : sous la plume de Philippe Ariès, l’histoire démographique devient une histoire de l’homme face à son destin, face à la nature, une histoire des relations que l’homme subit puis établit entre son univers et lui.
Les variations démographiques, Philippe Ariès nous le montre d’une façon passionnante, ne sont que les manifestations de changements plus profonds et plus secrets de la mentalité humaine. La société française a changé d’habitat, de natalité, de mortalité. Elle a déserté les campagnes pour les villes, commandé à la naissance et à la maladie. Mais, à l’origine de ces changements, il y a celui de l’attitude traditionnelle devant la vie.
La grande révolution démographique du XIXe siècle est liée à la modification d’un état de conscience. Une révolution de conscience, même, tout d’abord dans l’idée qu’on se fait de la famille : l’auteur nous montre le passage de la famille de type fécond, où l’enfant est négligé au profit du patrimoine et de sa main-d’œuvre, à la famille de type malthusien, où l’enfant occupe une place telle qu’on est contraint de réduire son nombre. De même, le passage d’une fécondité libre à une fécondité dirigée, par le recours aux procédés anti-conceptionnels, est précédé d’une révolution de conscience où le corps devient un objet de connaissance et d’intervention. Même processus enfin pour la mortalité : ce n’est qu’une fois l’idée, révolutionnaire, venue à l’homme de faire reculer la mort que la médecine s’est attelée à cette tâche.
Une Histoire des populations qui est en fait l’histoire du passage d’une civilisation de l’instinct à une civilisation de la conscience.
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« Nous nous intéressons au passé dans la mesure où il nous appartient et où nous lui appartenons » écrit Philippe Ariès dans sa préface. Ce pourrait être là la devise de la nouvelle collection du Seuil, « Points Histoire », dont le but est de mettre à la portée de tous des synthèses historiques de valeur. Les deux autres volumes déjà parus répondent à ce même souci du lecteur de se définir dans l’Histoire.
Comment le développement général encourage, suscite même, celui de la culture et l’oriente ; comment, à son tour, le mouvement intellectuel pèse sur la marche de l’Histoire : c’est la question à laquelle Philippe Wolf se propose d’emblée de répondre dans cet Éveil intellectuel de l’Europe, premier volume d’une série de six consacrés à l’Histoire de la pensée européenne. De Charlemagne à la moitié du XIIe siècle, c’est la première étape qu’il nous décrit ici, celle de la prime enfance d’un lent cheminement intellectuel, celle des premiers progrès de la culture européenne, liés profondément à l’évolution des structures économiques et sociales, voire commandés par elle. Centré sur les trois époques les plus chargées de nouveauté et sur les trois personnalités les plus significatives – Alcuin, Gerbert et Abélard –, ce premier volume nous montre un mouvement presque uniquement clérical créant l’infrastructure du mouvement culturel à venir. C’est l’histoire d’un éveil qui se fait à coups de renaissances, une marche en avant sans perdre de vue cependant le passé.
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Un passé dont on peut apprendre beaucoup de choses encore : Claude Mossé, l’un des meilleurs spécialistes français de l’histoire grecque, a utilisé les récents apports de l’archéologie et de l’épigraphie pour retracer la destinée brillante et fragile de la démocratie athénienne. Il nous montre comment et pourquoi, après une relative pénombre où elle reste en dehors des premiers bouleversements sociaux et politiques grecs, Athènes a su élaborer, entre le VIe et le IVe siècle avant notre ère, une pensée critique et politique dont les résonances nous parviennent encore. Il nous montre comment les Athéniens, malgré leur naufrage final dans les querelles de partis et de politiciens, ont leur place dans l’histoire des hommes appelés à bâtir le monde de demain. ♦