La Marne, victoire inexploitée
L’auteur entreprend une large étude en deux tomes sur les conditions dans lesquelles, à deux reprises, en 1914 et en 1940, la guerre-éclair a été menée en six semaines, avec les résultats différents que l’on sait. Ce premier tome est consacré aux débuts de la Première Guerre mondiale.
Nous ne partagerons pas entièrement l’enthousiasme dont Liddell Hart fait preuve dans la préface, lorsqu’il exprime son impression en disant : « en résumé, c’est l’ouvrage le plus honnête et le plus lumineux que j’aie jamais trouvé sur la campagne de 1914 ». Mais nous reconnaîtrons très volontiers que le travail de clarification auquel s’est livré le colonel Goutard est une précieuse contribution à l’étude cette période. En effet, c’est là ce qui frappe : les faits sont exposés dans leur enchaînement logiquement expliqué, suivant une thèse discutable, certes, mais parfaitement admissible, dans laquelle les grands chefs militaires aux prises avec les événements sont jugés objectivement, dans laquelle aussi ces événements prennent nettement leur relief et leur signification.
Ce passé semble lointain. Il faut faire un effort pour imaginer les conditions de la lutte d’alors, effort d’autant plus grand sans doute que le lecteur appartient à une génération plus jeune et a étudié avec moins de détail l’histoire de ces semaines tragiques.
Joffre avait perdu la bataille des frontières ; il gagne celle de la Marne, mais c’est une victoire incomplète, limitée, qui a cependant brisé le plan de campagne allemand et permis la victoire finale. Cela, le colonel Goutard le souligne très nettement. Aussi rend-il hommage à Joffre, malgré les critiques qu’il n’a pas manqué de lui adresser, et regrette-t-il que l’Armée française de 1940 n’ait pas été commandée par un Joffre.
Cette réflexion permet de comprendre la raison pour laquelle on attend avec intérêt le tome second de cet ouvrage.