Staline 1879-1953
Le lecteur qui a eu le courage d’aller jusqu’au terme de cette longue étude confuse, lourde, aussi indigeste que monotone, peut se demander quel homme était Staline : l’auteur lui a laissé le choix de conclure, après avoir cité des faits, énuméré des crimes. On peut penser que Staline était un monstre qu’animait le désir du pouvoir, d’un pouvoir voulu pour lui-même, puisqu’il ne profitait pas des avantages, des plaisirs, des agréments que le pouvoir apporte. Selon l’auteur, Staline aurait pu s’imposer à un pays de deux cents millions d’habitants, parce qu’il sut s’appuyer sur une caste de bureaucrates dont l’intérêt immédiat était de le soutenir ; cette caste le supprima lorsque l’excès des purges sanglantes la menaça.
C’est une explication simpliste ; pour être acceptable, elle aurait dû être étayée, amplifiée, nuancée, nourrie d’arguments.
Il est regrettable qu’une biographie de Staline soit si indigente. Le mystère de Staline est en effet l’une des clefs de l’histoire de notre époque. Qu’un criminel d’une telle envergure ait pu se maintenir à la tête d’un pays aussi immense, ait réussi à établir une dictature personnelle implacable dans un État communiste, à l’encontre de toutes les théories, que cet homme, à l’instruction et à la culture limitées, ait cependant dirigé victorieusement la défense nationale, influé dans les réunions internationales, transformé la carte de l’Europe et du monde, voilà qui reste surprenant pour l’esprit ; voilà ce qui doit être exposé, expliqué.
Le livre de Jean-Jacques Marie a le mérite de montrer, a contrario, ce qu’aurait dû être un livre sur Staline, au moment où l’auteur peut jouir d’un recul suffisant.