Baylen
En dépit de son titre restrictif, ce livre nous expose la première partie de l’insurrection espagnole de 1808 et la guérilla déchaînée lorsque Napoléon, fils de la Révolution, entreprit de régénérer le vieux royaume d’Espagne, son allié, et, pour ce faire, escamota les souverains légitimes pour les remplacer par son frère Joseph.
Nous assistons, après les premiers gestes offensifs au moyen de maigres effectifs entrés en Espagne en alliés, à la surprise déclenchée par la révolte qui s’allume partout à la fois, au nom du roi et de la religion.
Napoléon affecte d’abord de la minimiser ; mais elle l’oblige bientôt à se mettre sur la défensive alors que ce qui reste de l’armée espagnole va rejoindre et armaturer la guérilla pendant que les Anglais débarquent en Portugal et en Galice.
Et nous voyons combien sont difficiles l’organisation et le commandement de moyens insuffisants, à la fois en qualité et en quantité, obligés d’opérer sur de très grands espaces contre un ennemi essentiellement fluide, dans un pays hostile, pauvre, au climat rude.
L’exposé de ces opérations à la fois décousues et simultanées était pour l’auteur une tâche difficile ; pourtant les redites sont réduites au minimum et l’ensemble est très bien lié et d’une lecture facile et attachante.
Il s’en dégage une critique judicieuse des fautes initiales personnelles de Napoléon :
– « L’immoralité » de cette guerre qui exacerbe le sens national des Espagnols et affaiblit celui des Français ;
– La méconnaissance de l’ampleur de la crise que Napoléon déclenche pourtant lui-même ;
– La mauvaise routine d’un commandement centralisé par lui-même à Bayonne, loin des opérations, alors qu’il n’a jamais voulu former des lieutenants aptes à des commandements autonomes où l’initiative doit être de règle.
Aussi ces derniers ne manquent pas d’agir à contretemps, bien souvent excusables de ne pas atteindre des objectifs qui dépassent leurs moyens.
Tout ceci est sanctionné par cette capitulation du général Dupont à Baylen, qui donne son titre au volume.
Si M. de Beler néglige les procès faits à l’époque à Dupont, son étude très objective n’en met pas moins en évidence les circonstances et les responsabilités du désastre :
– Celles de Dupont et de Vedel que le dur été andalou semble engourdir dans des illusions, jusqu’à un réveil tardif et maladroit ;
– Celles de Savary, délégué de Napoléon à Madrid, qui n’a pas su ordonner le redressement stratégique qui aurait tiré Dupont de son guêpier ;
– Enfin, celles de Napoléon que nous venons de citer.
Et après un affolement, que l’importance de la défaite ne justifie pas, c’est une retraite générale sur les Pyrénées et, quatre mois après, il faudra repartir de zéro ; mais cette fois avec des moyens considérables qui s’useront et n’empêcheront pas, en 1814, la défaite et l’invasion de la France.
Et de tout cela nous pourrions conclure : « À bon entendeur, salut ! » ♦