D'un monde à l'autre : les « Mondes » que la librairie Plon nous présente dans une collection couverte par ce titre, sont, non seulement ceux de la Géographie, mais aussi ceux de l’Histoire, de l’Archéologie, de la Biologie, de l’Ethnologie, etc… C’est la collection des découvertes : l’homme y découvre l’homme se surmontant. Les points culminants du génie humain y constituent un vaste panorama. Grâce à elle nous sommes déjà partis en croisade, avec Gilbert Renault, dans les Caravelles du Christ des grands Portugais du XVe siècle, à la découverte de l’Afrique et des Indes. André Senet nous a entraînés, dans une quête émouvante, avec L’Homme à la recherche de ses ancêtres aux origines mêmes de la vie…
Aujourd’hui, c’est au cœur de certaines civilisations disparues que nous voulons pénétrer. Des guides de choix vont nous montrer comment les ruines, les pierres, les tombes, les objets usuels, les inscriptions peuvent constituer des ponts par-dessus les millénaires et établir des contacts vivants entre notre génération et les plus anciennes de celles qui firent s’épanouir l’esprit humain et s’organiser hautement la manière de vivre des hommes.
Le temps semble révolu où l’on voyait les archéologues le front ceint d’une auréole romantique. Le règne de Schliemann, de sir Arthur Evans et de Botta est dépassé. Les grands pionniers ont constitué, par leurs découvertes, le cadre de nos connaissances. Sans doute bien des détails sont encore à trouver, mais ces détails ne sont plus l’essentiel des recherches. D’ailleurs, des méthodes scientifiques ouvrent des possibilités nouvelles fort étendues. Ce qui importe aujourd’hui c’est de relier les unes aux autres les données acquises, de les coordonner, d’en tirer des conséquences, sous forme « d’une vue plus large qui transcende les domaines propres à chaque civilisation ».
« La grande tâche de l’archéologie… est… de révéler comment les grandes civilisations ont réagi les unes sur les autres », écrivait sir Léonard Woolley. On voit de suite que la résolution de tels problèmes dépasse la simple discipline de recherche et exige l’exploitation de données nouvelles tirées des études historiques, linguistiques, de l’histoire de l’art et de celle des civilisations, etc.
Les recherches faites par Wolley à Atchara (Alalakh) illustrent cette méthode. Le cheminement de la pensée de l’archéologue anglais montre comment, parti de l’intention première de rechercher la nature, les origines et le caractère des influences asiatiques sur Cnossos, il en arriva, après des études géographiques, économiques, commerciales même, à se fixer sur un site inconnu. Or les fouilles révèlent que l’antique Alalakh constitue un important point de repère dans l’histoire du Proche Orient. « En contact continuel avec les grands empires de Sumer, de Babylone et d’Égypte, avec l’empire Hittite et Boghaz-Keui en Anatolie, avec les puissances moins bien connues du Hurri et du Mitani, Alalakh explique le développement de l’art crétois… Associé à la culture du moyen-bronze en Chypre, témoin de l’extension du commerce des îles grecques avec l’Orient, dans les temps proto-historiques, Alalakh éclaire d’un jour nouveau certains aspects économiques de l’empire d’Athènes, et enfin suggère une contribution syrienne au développement de l’art de la Renaissance italienne. »
Le chapitre sur Stonehenge montre que dans des cas où les disciplines classiques ont laissé de grandes incertitudes l’apport des méthodes scientifiques est péremptoire et déterminant. L’étude de la campagne romaine en Apulie et en Afrique du Nord illustre la recherche par photographie aérienne mise au point par le R.P. Poidebard. Les notes consacrées à l’époque pré-homérique sont une occasion de mesurer la valeur des textes anciens et « qu’il est bon de suivre à Troie un guide tel qu’Homère, à Mycènes un homme tel que Pausanias, en Orient Hérodote ». Le déchiffrement des hiéroglyphes hittites (sur lesquelles nous reviendrons dans un autre ouvrage) bouleverse nos connaissances du Proche-Orient antique. Enfin la découverte des manuscrits hébreux trouvés dans des grottes proche la mer Morte nous permet de saisir le climat religieux dans lequel le christianisme est né. ♦