Le problème des transports fluviaux
L’importance des transports fluviaux dans l’économie française est souvent méconnue. Cependant, en 1938, notre flotte de navigation intérieure, augmentée des flottes du Rhin et du Danube, représentait 4 815 000 tonnes de portée en lourd alors que notre marine marchande ne totalisait que 4 500 000 t, le trafic des ports intérieurs s’élevait à 75 500 000 t manipulées contre 52 000 000 pour les ports maritimes, le port de l’agglomération parisienne dépassait, de loin, avec 15 530 000 t le trafic de Marseille, de Rouen et du Havre et le réseau navigable transportait plus de 30 % du tonnage confié à la voie ferrée.
Dans un ouvrage d’ensemble, M. Marcel Jouanique dresse un tableau complet de la situation actuelle des transports par eau en France. Après avoir retracé l’histoire de notre réseau navigable artificiel, dont l’origine remonte au XVIe siècle, l’auteur s’est attaché à analyser les caractéristiques générales du trafic, tant au point de vue des marchandises transportées que des principaux courants de navigation.
La partie de ce livre, consacrée à l’étude de l’organisation des transports par eau, permet de se rendre compte comment la batellerie – dont le personnel est composé en majorité d’artisans – s’est peu à peu modernisée sans, pour cela, perdre son caractère original. C’est ainsi que, malgré les avantages apparents que présente le chemin de fer, la navigation intérieure a réussi à maintenir, d’une façon remarquable, depuis trente ans, la constance de son trafic et apparaît, en définitive, comme mieux armée que son puissant concurrent, pour résister aux crises économiques.
Le véritable problème consiste à assurer à la voie d’eau – dont le prix de revient reste le moins élevé –, la place que lui assigne, parmi les différents modes de transport, sa nature, ses aptitudes et ses moyens d’action. Il ne semble pas, malheureusement, qu’une coordination efficace des transports ait été réalisée jusqu’à ce jour en France. Les pages que M. Marcel Jouanique consacre à l’intervention de l’État dans ce domaine n’incitent pas, en effet, à conclure que la législation complexe qui en est résultée ait contribué au développement commercial et technique de la batellerie.
Tandis que, depuis trente ans, les crédits consacrés à nos voies navigables sont de plus en plus insuffisants, de nombreux travaux ont favorisé l’extension et la modernisation des réseaux étrangers et M. Marcel Jouanique peut écrire, avec raison, que la France ne tire pas tout le parti possible de canaux qui restent, dans l’ensemble, désuets et mal outillés. Divers grands projets ont, cependant, été étudiés en vue d’accroître le rendement de nos voies navigables. Il importe de mettre rapidement à exécution les plus importants d’entre eux : telle est la conclusion de ce livre où sont évoqués avec clarté, les différents aspects d’un problème dont la solution conditionne, en partie, le relèvement de l’économie française.