Le but poursuivi par la revue est de donner à ses lecteurs des éléments d'information et de réflexion que l'on peut trouver dans un large éventail d'opinions. Pour étudier le problème de SALT III, l'auteur passe d'abord en revue les thèses qui s'opposent en France, puis observe la sécurité en Europe, la militarisation du monde et les équilibres stratégiques. S'il en conclut que la France ne doit pas participer à cette négociation, il n 'en reste pas moins un ferme partisan de l’Arms control.
Les voies nouvelles qu'il envisage ont chacune leurs avantages et leurs inconvénients. Un amateur d'histoire ne peut s'empêcher d'y retrouver des points qui ont hanté les discussions entre Britanniques et Français vers 1930. Les armements sont-ils la cause des guerres ou eux-mêmes le résultat des confits, ouverts ou latents, entre les peuples ? Quand on propose de négocier sur les intentions stratégiques ou les missions des forces armées, il semble voir apparaître le spectre du désarmement « qualitatif » inventé par Liddell Hart (ou tout au moins il s'en vante dans ses mémoires), qui est en partie la cause de la défaite des armées françaises de 1940 , dotées d'une stratégie et d'un armement « défensifs ». Certes, il n'y a pas d'Arms control sans mesures de confiance, mais il n'y a pas de paix réelle, donc de désarmement ou de limitation des armements, sans une sécurité faite de confiance mutuelle. « Mais notre époque a-t-elle gardé le goût de la paix ? ».
La France doit-elle participer à une éventuelle négociation sur la limitation des armements stratégiques, c’est-à-dire à SALT III ? Dans la négative on peut se demander comment justifier une telle attitude et ce qu’il faut penser du principe même des négociations SALT pour l’avenir. Y a-t-il des possibilités sérieuses de désarmement ou de contrôle des armements nucléaires dans le contexte présent des relations Est-Ouest ?
La situation actuelle
Les thèses en présence en France
Trois thèses principales s’expriment à l’heure actuelle. La première est celle du gaullisme traditionnel qui préconise le maintien de la politique de la chaise vide aux négociations d’Arms control, donc à SALT III. Elle se fonde sur une méfiance instinctive à l’égard de toute l’entreprise du contrôle des armements, fruit du condominium nucléaire des deux Grands, moins destinée à modérer la course à ces derniers qu’à barrer la route aux petites puissances nucléaires, plus encline à sacrifier aux intérêts égoïstes des deux puissances et à la sanctuarisation de leur propre territoire qu’au renforcement de la sécurité internationale. On craint, au travers des SALT, l’établissement d’un « ordre nucléaire » exclusivement favorable aux deux Grands. Face à la complexité objective de l’Amérique et de l’URSS, la France doit préserver plus que jamais sa liberté d’action en matière nucléaire.
Les « faucons » français sont encore plus nettement hostiles à SALT III. Ils rejettent non seulement l’idée de la participation française à une telle négociation mais son principe lui-même. Leur hostilité à l’égard de l’Arms control s’explique avant tout par leur méfiance à l’égard de l’Union Soviétique. Ils sont convaincus du caractère agressif de la politique de ce pays et mettent en avant, tout à la fois, les nouveaux missiles intercontinentaux, les SS 20, et les aventures soviétiques dans le Tiers Monde (Angola, Éthiopie, Afghanistan). Cette thèse exprime la résurgence en France d’attitudes occidentales traditionnellement méfiantes à l’égard de la détente, sceptiques quant à la crédibilité de la force nucléaire française et favorables à un rééquilibrage des forces en faveur de l’Alliance atlantique. Les partisans de cette thèse critiquent l’accord SALT II dans la mesure où ce dernier aurait trop favorisé l’accès soviétique à la parité stratégique et trop négligé les intérêts de l’Alliance atlantique. En conséquence, ils ne veulent pas de SALT III, tant ils sont convaincus qu’une telle négociation ne peut qu’avantager encore plus nettement les intérêts soviétiques en Europe. Ils estiment que la France doit soutenir publiquement la modernisation nucléaire de l’OTAN.
La situation actuelle
Les thèses en présence en France
La sécurité de la France et de l’Europe en question ?
La militarisation de la société internationale et les équilibres stratégiques
La politique de défense de la France
SALT III continue SALT II
Les intérêts des Européens
La nature des forces stratégiques françaises
L’avenir de l’Arms Control
Insuffisances et tentations actuelles
Les voies nouvelles
Conclusion : deux suggestions