Le Laboratoire de recherche sur la défense (LRD) créé en 2006 à l’Ifri constitue un exemple pertinent de coopération civilo-militaire axée sur les questions de défense. Son mode de fonctionnement original constitue un atout pour le débat stratégique.
Coopération civilo-militaire et recherche stratégique : le cas du LRD
Civil-military cooperation and strategic research: the case of LRD
The Defense Research Unit (LRD – Laboratoire de recherche sur la défense) created in 2006 at the French Institute of International Relations (IFRI – Institut français des relations internationales) is a pertinent example of civil-military focused on the questions of defense. Its original way of functioning constitutes an asset for the strategic debate.
Si la coopération civilo-militaire est un idéal souvent difficile à atteindre en opération, elle n’est pas moins rare dans le domaine de la recherche stratégique. C’est afin de combler cette lacune que, depuis 2006, l’Institut français des relations internationales (Ifri) s’est engagé dans une initiative jusqu’alors inédite en France grâce à la mise en place en son sein du Laboratoire de recherche sur la défense (LRD). Cette structure mixte associe directement civils et militaires avec pour vocation de renouveler la recherche sur la défense et de peser sur le débat stratégique français. À l’heure où cette structure s’apprête à fêter ses dix ans d’existence, il semble intéressant de souligner son originalité dans le paysage intellectuel et stratégique français.
Le rôle des think tanks dans la recherche stratégique en France
La recherche stratégique en France a longtemps été l’apanage de l’institution militaire. Fidèle à une longue tradition de pensée militaire, particulièrement vivace jusqu’aux années 1960 et qui renaît lentement depuis le début des années 2000, le ministère de la Défense compte en son sein de nombreux organes, tant militaires (CDEF, Cesat, CESM, Cesa, etc.) que civilo-militaires (Irsem, SHD, etc.), produisant une abondante littérature grise, parfois de grande qualité, mais en étant toujours soumis au devoir de réserve et au regard de la hiérarchie institutionnelle (1).
À l’autre bout du spectre, la recherche académique, civile et indépendante, a souffert d’un déficit d’attention chronique à l’égard des questions stratégiques. L’université y a répugné, tant pour des raisons bureaucratiques (absence de cadre disciplinaire reconnu pour la stratégie de même que pour les relations internationales) qu’idéologiques (antimilitarisme atavique d’une partie de la classe universitaire doublée d’une réticence plus générale à orienter la décision publique), à la différence notamment des Britanniques (War Studies). Cette méfiance de l’université lui était d’ailleurs bien rendue par l’institution militaire qui gardait jalousement ce pré carré intellectuel. Il existe naturellement, et fort heureusement, de brillantes exceptions autour de personnalités civiles ayant marqué la pensée stratégique – de Raymond Aron à Hervé Coutau-Bégarie – mais qui n’ont pas fait souvent école.
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