Les mythes de la Seconde Guerre mondiale
Les mythes de la Seconde Guerre mondiale
L’histoire de la Seconde Guerre mondiale est encore loin d’être achevée – si tant est qu’elle le soit un jour. Et le renouveau historiographique portant sur ce qui reste le plus grand drame humain et géopolitique du XXe siècle ne cesse de nous le prouver depuis plusieurs années.
Malheureusement, hormis la corporation des historiens professionnels, bien peu de monde dans le public – y compris dans ce qu’il est convenu d’appeler le « grand public cultivé » – sont informés de ce renouvellement de nos connaissances. Et les légendes, clichés, lieux communs et analyses erronées de se perpétuer à l’infini…
Fort heureusement, de nouvelles générations d’historiens ont décidé de prendre en main le travail civique consistant à mettre à la disposition des citoyens les plus récents apports d’une recherche historique qui permet d’en finir avec des mythes nocifs, tout particulièrement dans les aspects militaires de ce conflit. Jean Lopez et Olivier Wieviorka sont de ceux-là, et ils ont rassemblé autour d’eux vingt-trois historiens jeunes ou moins jeunes pour qu’ils traitent chacun d’une de ces questions sur lesquelles tant de choses fausses ont été écrites et répandues depuis longtemps.
Vingt-trois chapitres, donc, qui traitent : des failles dans le soutien politique et social dont souffrit le Premier ministre britannique Winston Churchill ; du caractère prétendument inéluctable de la défaite française de mai-juin 1940 ; de la croyance dans le fait que les sous-marins allemands ou les armes secrètes allemandes pouvaient renverser le cours de la guerre ; de la légende qui prétend qu’en attaquant l’URSS le 22 juin 1941, Hitler n’a fait que devancer une attaque de Staline ; de la prétendue victoire japonaise à Pearl Harbor ; des supposées qualités de grand stratège d’Erwin Rommel ; du fait que les cheminots français auraient constitué le fer de lance de la Résistance et auraient pris une part déterminante à la Libération ; de la croyance sur le fait que l’économie soviétique n’aurait pas été capable de rivaliser avec le potentiel industriel du Reich ; du fait que les compétences militaires du maréchal Montgomery auraient été surestimées ; du fait que les Waffen SS auraient été des soldats d’élite ; du fait que cette guerre n’aurait été qu’une affaire d’hommes ; des préjugés quant à la supposée mauvaise qualité de l’armée italienne ou des soldats américains ; de la regrettable myopie tout européenne qui n’a vu dans la guerre du Pacifique qu’un théâtre d’opérations secondaire ; du fait que le débarquement de Provence aurait été inutile, de même que l’aurait été le sacrifice du corps expéditionnaire français en Italie ou celui des kamikazes dans le Pacifique ; à l’inverse, du caractère que l’on a longtemps cru décisif des bombardements alliés sur l’Allemagne ; de la part, que l’on a souvent décrite comme majeure, de la France dans la victoire alliée de 1945 ; de la soi-disant seule et unique responsabilité de Hitler dans la défaite allemande ; des bombardements nucléaires de Hiroshima et Nagasaki comme supposée cause de la capitulation japonaise ; et enfin du sempiternel cliché qui voit dans la conférence de Yalta le partage du monde entre Roosevelt et Staline.
Seule la question de la Shoah est absente, mais il est vrai qu’elle a déjà été abondamment traitée et mise à jour par de nombreux travaux bien connus. Si ce livre ne clôt pas la recherche et la réflexion, car d’autres mythes restent à briser et même ceux abordés ici peuvent encore donner lieu à d’autres révisions, il n’en demeure pas moins un ouvrage dont tirera profit tout citoyen cherchant à réfléchir sur cette tragédie, ou encore tout étudiant et peut-être plus encore tout enseignant. Enfin, ce sera désormais une lecture indispensable pour tout militaire ou toute personne travaillant sur les questions stratégiques. À cet égard, je leur recommanderais tout particulièrement les chapitres consacrés à Pearl Harbor, Rommel, les Waffen SS, les soldats américains, les bombardements sur l’Allemagne, les armes miracles allemandes, et les responsabilités de Hitler dans la défaite allemande, qui sont de véritables leçons appliquées dans l’Art de la guerre. ♦