Les États-Unis entretiennent une longue relation avec les pays du Maghreb, marquée essentiellement par des besoins sécuritaires. À la suite des printemps arabes, Washington a réaffirmé son engagement pour cette région dont la stabilité est indispensable.
Les États-Unis et le Maghreb : une très longue histoire
The United States and the Maghreb: A Very Long History
The United States maintains a long relationship with the Maghreb countries, marked essentially by security needs. Following the Arab Spring, Washington reaffirmed its engagement in this region whose stability is vital.
Le premier couplet du chant officiel du Corps de Marines américain, sur un air emprunté à l’opéra-bouffe Geneviève de Brabant d’Offenbach, fait référence à une bataille de 1805 menée par des fusiliers marins de la jeune marine nationale à Tripoli, dans l’actuelle Libye. Cette première bataille des Marines eut lieu lors de la guerre de la Côte barbaresque (1801-1805), la toute première guerre déclarée et engagée par les États-Unis après leur indépendance. La décision de recourir aux armes faisait suite au refus de continuer à payer tribut aux « États barbaresques » du Maghreb pour protéger le commerce américain en Méditerranée, une somme qui avait atteint 10 % du budget national. La piraterie maghrébine avait déjà provoqué le vote par le Congrès de la « Loi navale de 1794 » afin d’établir une vraie marine nationale. L’United States Navy trouve ainsi sa gestation dans les relations américaines avec le Maghreb. Ces dépenses militaires plutôt onéreuses pour la jeune république se sont avérées au bout du compte moins lourdes et plus honorables que l’obligation de garnir les trésors des potentats, dont Washington fut libéré par un traité en 1805.
Lorsque l’on considère la politique étrangère américaine, l’aspiration à conjuguer les intérêts commerciaux et les valeurs républicaines demeure. Il est bien possible qu’aux yeux de Thomas Jefferson, alors président et à ce titre commandant en chef de cette guerre, les royaumes musulmans aient incarné deux des institutions qu’il détestait le plus – la monarchie et la religion d’État. Ses propres sentiments ambivalents concernant l’esclavage ont peut-être aussi été ébranlés par l’ampleur de la traite régionale, plus d’un million de chrétiens européens et quelques Américains ayant été réduits en esclavage en Afrique du Nord musulmane entre 1530 et 1780 (1).
L’intérêt américain pour l’Afrique du Nord fait donc partie d’une tradition établie de longue date, antérieure même à l’indépendance des États-Unis. Les liens commerciaux ont été très rarement interrompus, même pendant la période où les pays d’Europe occidentale ont absorbé dans leurs empires la rive sud de la Méditerranée. Si l’on cherche une ligne directrice de longue durée, elle se définit par le commerce, qui néanmoins demeure très marginal, n’atteignant même pas de nos jours 1 % des échanges extérieurs des États-Unis. La conquête de l’Algérie et de la Tunisie par la France a largement évincé les Américains, mais Washington a réussi à garder entre-ouverte une porte avec le Maroc (2), qui a, au demeurant, été le premier pays à établir les relations diplomatiques (en 1777) avec la jeune république états-unienne.
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