Dans un contexte d’extrême fragilité sécuritaire, l’arc sahélo-saharien constitue une zone majeure pour les narcotrafics approvisionnant les consommateurs de drogue en Europe. Cette menace s’étend et pourrait accroître la déstabilisation de plusieurs États africains incapables de lutter efficacement contre ce fléau.
Les narcotrafics sur l’arc sahélo-saharien : une traînée de poudre qui se répand en Afrique
Drug Trafficking in the Sahelo-Saharan Region: A Trail of Powder Spreading in Africa
In a context of extreme fragility of security, the Sahelo-Saharan region constitutes a major zone for drug traffickers supplying drug users in Europe. This threat expands and could increase the instability of several African states incapable of effectively combating this scourge.
Les drogues constituent le troisième plus grand commerce au monde après celui du pétrole et des armes (cf. O. Weber). Générant entre 300 et 500 milliards de dollars chaque année (cf. A. Tokatlian), les narcotrafics comptent à ce jour parmi les principaux flux du sud vers le Nord. Par définition, le narcotrafic désigne l’ensemble des échanges illégaux de produits dérivés de plantes comme le coca et l’opium ou de substances psychotropes utilisées comme médicaments. Si l’Amérique latine et le Croissant d’or (Afghanistan, Iran, Pakistan) furent historiquement les deux zones les plus dynamiques en matière de trafic de drogues, d’autres foyers ont récemment émergé parmi lesquels, l’Asie du Sud-Est, le Triangle d’or (Birmanie, Thaïlande, Vietnam) et l’Afrique de l’Ouest avec la bande sahélo-saharienne.
S’étendant majoritairement d’ouest en est, des côtes mauritaniennes aux frontières occidentales du Tchad et du Soudan, la bande sahélo-saharienne s’est depuis longtemps illustrée comme carrefour d’un ensemble d’activités commerciales licites ou illicites avec son vaste réseau de routes caravanières ancestrales. Or, depuis le milieu des années 2000, cet espace a évolué au point de former une « narco région » (cf. B. Thiolay). Ainsi au cœur de cet arc sahélo-saharien où se développe un réseau de flux illégaux d’armes, de cigarettes ou de ressources naturelles, les trafiquants de drogue arrivent en tête du classement en régnant en véritables rois du pétrole sur un business aux montants faramineux estimés chaque année, en euros, à 1,1 milliard pour la cocaïne et 54 millions pour le haschich (cf. B. Thiolay).
Par sa situation géographique privilégiée depuis les origines du commerce triangulaire, le Sahel est donc devenu progressivement une véritable « plaque tournante » sélectionnée pour sa vaste superficie et à la porosité de ses frontières qui rendent difficile le traçage de ces flux. Tout d’abord, cette région se distingue avec la Highway 10, voie aéromaritime la plus directe entre les pays d’Amérique du Sud producteurs de cocaïne et le continent africain. De la même façon, les producteurs d’héroïne concentrés sur l’aire indo-asiatique font également transiter leur drogue par la Corne de l’Afrique avant de l’acheminer vers le nord du continent par la « Route du Sud », axe trans -sahélo-saharien qui part des confins du Sud-Soudan pour rejoindre le Maroc, en direction de l’Europe.
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