La recherche non institutionnelle est riche de nombreuses initiatives individuelles s’appuyant sur la fluidité d’Internet. Ce « terreau » de passionnés est essentiel pour la diffusion d’une pensée stratégique francophone, à condition de la soutenir plus efficacement.
Recherche stratégique : entre institutions et initiatives
Strategic Research: Between Institutions and Initiatives
Non-institutional research is rich in numerous, individual initiatives resting on the fluidity of the internet. This “breeding ground” of impassioned thinking is essential for the diffusion of strategic, francophone ideas, provided that it is more effectively supported.
La notion de « recherche stratégique » fait peur au profane, car elle touche à deux disciplines qui s’intéressent aux choses fondamentales : la « recherche », associée à l’esprit scientifique, renvoie dans l’imaginaire aux travaux de théorie physique sur la matière ou l’espace sidéral et donne le sentiment d’une expertise extrêmement pointue. Quant à la stratégie, elle préside au destin d’une organisation, qu’il s’agisse d’un pays ou d’une entreprise. Une erreur stratégique peut être fatale et menacer l’existence même de l’organisation. Accoler ces deux termes fait logiquement forte impression. Mais par voie de conséquence, la recherche stratégique paraît si inaccessible qu’elle risque de détourner l’intérêt, tant du grand public que des institutions qui devraient, normalement, s’y consacrer. Accessoirement, beaucoup doutent (sans l’avouer explicitement) de l’utilité de ces spéculations et donc de la nécessité d’y consacrer efforts et ressources.
Pourtant, chacun sent bien qu’il y a besoin d’une analyse stratégique qui conduise à des prescriptions : s’agit-il pour autant de « recherche » ? Autrement dit encore, comment articuler une « démarche stratégique » qui apparaît nécessaire (quoique difficile) et une « recherche stratégique » qui serait plus théorique, conceptuelle, spéculative ? Ce dilemme recouvre bien sûr le débat ancien entre recherche théorique et recherche appliquée. L’état de l’art en France montre la permanence d’institutions dédiées et d’initiatives individuelles, ce dernier mouvement étant renforcé par l’Internet.
Difficultés durables
La difficulté semble surtout concerner la recherche qui s’intéresse aux stratégies étatiques, plus particulièrement celles de défense et de sécurité. En effet, les stratégies non militaires trouvent assez facilement à s’exprimer. La stratégie d’entreprise est abondamment étudiée par les sciences de gestion, dans les universités ou les écoles de commerce. Les stratégies publiques font également l’objet de nombreuses études, principalement à l’université, dans le cadre des sciences politiques et des filières d’administration publique. En revanche, la stratégie première, celle qui concerne les questions de défense et de sécurité, ne bénéficie pas de tels lieux, du moins en France. Au fond, la question de la « recherche stratégique » est d’abord une question française qui peut s’énoncer autrement : la recherche stratégique en France ne disposerait pas de « lieux » où elle pourrait s’effectuer.
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