Îles, péninsules, isthmes, détroits et ports, etc., autant d'éléments géographiques qui exercent une influence décisive sur la stratégie, dès qu'elle devient opérationnelle. À la lumière des enseignements tirés des plus récents conflits, la dimension maritime de la géostratégie s'avère primordiale.
Le facteur géostratégique
Nul n’ignore aujourd’hui qu’en matière de stratégie générale, on doit considérer une multitude de facteurs, ethnographiques, démographiques, psychologiques, technologiques, diplomatiques, militaires, économiques, financiers, industriels, alimentaires, commerciaux, etc. On sait aussi que les bonds technologiques accomplis par les « grands » en matière d’armements ont abouti, pour le moment, à leur dissuasion nucléaire réciproque, cependant que les « petits » — approvisionnés par les grands en armements dits classiques — pratiquent, épisodiquement, des actions militaires du genre raids, guérillas, terrorisme, et en permanence valorisent leur potentiel matériel par une action d’ordre psychologique qui, par son retentissement international, permet à certains d’entre eux de tenir tête à un grand.
Dans l’actualité quotidienne, la technologie et ce qu’on pourrait en quelque sorte nommer la psycho-diplomatie tiennent donc la vedette, suivies de près par les questions sociales, économiques et financières. Par contre, lorsque survient une « crise » violente, on voit réapparaître au premier plan un facteur généralement oublié, méconnu et même décrié ou considéré comme périmé par certains : la géostratégie. Il est pourtant indiscutable, par exemple, que lors de la guerre de Corée en 1950-1953, le fait primordial qui ne cessa de peser sur les opérations fut qu’il s’agissait d’une péninsule coupée artificiellement en deux par la diplomatie au mépris des réalités humaines à hauteur du 48e parallèle nord, et dont le pédoncule méridional constituait en fait, d’un point de vue géostratégique, une île soutenue par les États-Unis maîtres de la mer. Dans « l’affaire des missiles » de Cuba en 1962, le facteur primordial était, non moins indiscutablement, qu’il s’agissait d’une île, voisine des États-Unis et séparée de l’U.R.S.S. par l’Atlantique dont la marine américaine avait la maîtrise incontestée. La guerre du Vietnam, depuis 1965, présente les mêmes caractéristiques géostratégiques que celle de Corée, la ligne de démarcation diplomatico-militaire étant, cette fois, le 17e parallèle nord. Quant au conflit israélo-arabe, dès que l’on en vient aux crises militaires, on voit subitement surgir, au premier plan, les déserts du Sinaï et du Negueb, le fleuve Jourdain, le canal de Suez, les détroits de Tiran ou de Bab-el-Mandeb, les golfes de Suez ou d’Akaba, etc. Enfin l’actuel drame pakistanais a révélé à beaucoup que cet État était constitué de deux « îles » séparées par toute la largeur de l’immense péninsule indienne, hostile au pouvoir officiel pakistanais concentré dans « l’île » occidentale, lequel ne peut agir dans « l’île » orientale que par la longue route maritime contournant ladite péninsule.
Avant d’analyser de plus près les facteurs géostratégiques de la guerre israélo-arabe d’aujourd’hui, nous pensons qu’il n’est peut-être pas sans intérêt de souligner le rôle primordial qu’ont joué de tels facteurs lors du fameux débarquement de 1944 en Normandie.
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