Military history–About Verdun
Histoire militaire – À propos de Verdun
À en croire certaines publications récentes parues dans le cadre du Centenaire de la bataille de Verdun, un grand nombre d’historiens reconnus emboîtent le pas de l’école historique allemande actuelle emmenée par Gerd Krumeich selon laquelle l’intention allemande à Verdun consistait bel et bien à conduire une attaque brusquée, destinée à percer le front français. Selon cette nouvelle école, les décisions « funestes » de Falkenhayn, chef d’état-major impérial allemand, auraient empêché l’armée impériale allemande de remporter un succès décisif à l’Ouest en 1916 et, pour camoufler les « insuffisances » qui lui sont prêtées, ce dernier aurait bâti de toutes pièces, après-guerre, la légende d’une offensive à objectif limité visant à restreindre son action à une usure de l’armée française à Verdun.
Quels sont les arguments de cette nouvelle école de pensée ? Au lieu de limiter son action à la seule conquête des Hauts de Meuse – qui, dans les faits, n’ont d’ailleurs jamais été pris – Falkenhayn aurait en réalité envisagé une manœuvre plus large, une action en force, sous la forme d’une attaque brusquée. Selon cette logique, celle-ci aurait dû viser, dans une première phase, à faire tomber la place de Verdun et à aligner le front allemand entre le saillant de Saint-Mihiel et l’Argonne (effet final qui aurait permis de récupérer un certain nombre de divisions par la disparition du saillant de Verdun), puis, dans une seconde phase, conquérir un espace de manœuvre entre Meuse et Seine, de manière à ouvrir à l’armée allemande la route de Paris, rééditant ainsi la manœuvre de l’automne 1870. Vastes perspectives !
Comme les archives de l’armée allemande ont brûlé dans l’incendie des bâtiments du Reichsarchiv lors d’un bombardement allié en avril 1945, l’historien manque de matériaux primaires pour étayer toute thèse, quelle qu’elle soit, et doit donc souvent se contenter des souvenirs des différents protagonistes dont tout un chacun connaît les faiblesses. Ou bien, il formule des supputations, mais qui ne sont qu’hypothèses, faute de documents. Il demeure néanmoins une autre voie en histoire militaire qui consiste tout simplement à confronter toute thèse avec la situation militaire du moment, les capacités intrinsèques des unités disponibles, les normes d’engagement et les principes tactiques en vigueur à l’époque considérée. C’est tout l’intérêt en histoire militaire d’adapter la rigueur de la méthode historique avec le cartésianisme de toute méthode de raisonnement tactique.
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