Terreur dans l’hexagone, genèse du djihad français
Terreur dans l’hexagone, genèse du djihad français
Depuis qu’il nous a donné Le Prophète et Pharaon (1), ouvrage fondateur qui n’a pas pris une ride, Gilles Kepel s’impose comme un des meilleurs connaisseurs de l’islam. Il s’est depuis lors attaché à nous prévenir de ce qui se passait chez nous : l’islamisation discrète mais constante de la France, phénomène dont Pierre Manent a, de son côté, signalé les effrayants progrès (2).
Aussi bien Gilles Kepel, dès son exergue, nous met dans l’ambiance : il reproduit en verbatim le « Communiqué sur l’attaque bénie de Paris, capitale des abominations et de la perversion, celle qui porte la bannière de la croix en Europe ». Il y ajoute ce constat brutal : « Saint-Denis, sépulture des rois et aujourd’hui capitale de l’islam de France ».
Le livre de Kepel est en deux parties : l’incubation (2005-2012), l’éruption (2012-2015). Dans la première, il constate une montée inédite des conversions à l’islam. L’utilisation de « l’islamophobie » n’y est pas étrangère, concept de combat inventé par les Frères musulmans dans les années 1990. Sa réussite la plus spectaculaire est la conversion de Carlos à l’islam alors qu’il était incarcéré et la plus récente celle d’Amedy Coulibaly dans les mêmes conditions, après qu’il eût été reçu à l’Élysée en 2009 comme modèle d’une reconversion réussie (sic). « L’incubateur carcéral », en effet, a longtemps été ignoré par les dirigeants et les élites intellectuelles de la France. De cet aveuglement témoigne la construction, en 2013 à Trappes, d’une mosquée de 2 400 places avec l’aval de la municipalité. De cette complicité avec un électorat potentiel résulte la politisation de l’islam de France, renfort électoral de l’élection de 2012, l’affaire Merah en mars 2012, œuvre d’un assassin ordinaire, et l’apparition surréaliste à Artigat, patrie de Martin Guerre, d’un phalanstère salafiste où la consommation de haschich entretient la ferveur des croyants ; la renforce aussi, plus généralement, le cyber-djihad. Omar Omsen, cyber-recruteur sénégalais fort en vogue, fait un malheur dans la génération Y (3).
Après l’incubation, l’éruption : Gilles Kepel la décrit dans sa seconde partie, « De Hollande à Charlie et au Bataclan (2012-2015) ». Lunel en Hérault, puis Trappes en Yvelines détiennent le record des djihadistes volontaires. En une surprenante collusion islamo-gauchiste se retrouvent Alain Gresh, communiste disciple de Tariq Ramadan, Emmanuel Todd, mais aussi Pascal Boniface signant un livre en 2012 avec Médine Zaouiche. Gilles Kepel avait senti venir le vent dans ses Banlieues de l’islam (1991 et 2015). Ses sombres prédictions ont été dépassées. Alors, une fois encore, que faire ? Pour Kepel, la laïcité, au sens républicain et démocratique, est la seule voie de sortie de cette tragique impasse. ♦
(1) Gilles Kepel : Le Prophète et Pharaon ; La Découverte, 1984 et Folio histoire, 2012 ; 368 pages.
(2) Pierre Manent : Situation de la France ; Desclée de Brouwer, 2015 ; 176 pages.
(3) Y pour les câbles : deux écouteurs aux oreilles, un micro sur le ventre.