Maritime Strategy–Fighting Against Illegal Fishing: A Blue Defense Issue
Stratégie maritime - Lutter contre la pêche illégale : l’enjeu de la défense bleue
Il nous a été promis un XXIe siècle maritime et force est de constater qu’aujourd’hui, malgré des variations conjoncturelles, tous les indicateurs économiques du monde maritime poursuivent leur tendance haussière. Le potentiel maritime s’exprime grâce à une multiplication des utilisations du milieu marin, de la surface au sous-sol. Il a d’ailleurs trouvé son vocable : l’économie bleue ou croissance bleue. Or, bien que le terme ne soit pas encore consacré, c’est déjà de défense bleue dont il est aussi question. À l’heure où le contexte géopolitique mouvementé appelle l’engagement de la Marine sur différents théâtres de guerre, il est nécessaire de ne pas perdre de vue qu’à l’autre extrémité de l’éventail, des missions non moins militaires requièrent l’engagement de la Marine sur ce qu’il est convenu d’appeler le « théâtre national ».
Le concept militaire a le mérite d’être connu et bien assimilé en interarmées. Pour les marins, il recouvre principalement les eaux sous souveraineté et juridiction françaises, c’est-à-dire les eaux territoriales mais aussi les 11 millions de km² de zone économique exclusive (ZEE) de la métropole et surtout des outre-mer. Ces missions militaires dans les eaux nationales contribuent directement à l’exercice de la souveraineté de l’État côtier, au sein du vaste ensemble des missions relevant de l’action de l’État en mer (AEM). Il en est une parmi elles qui se distingue par sa singularité : la lutte contre la pêche illégale. Méconnue alors qu’il s’agit de la première des polices en mer, cette mission est souvent assimilée à la police du poisson. Il s’agit pourtant d’une mission essentielle grâce à laquelle il est possible de recueillir et d’analyser un grand nombre d’informations constituant autant de signaux faibles qui, une fois mis en perspective, sont les précurseurs ou les indicateurs de divers trafics illicites menaçant nos intérêts. Dans certains cas, il n’est pas rare qu’ils reflètent les germes voire les braises d’un conflit régional ou pour le moins de revendications concurrentes de souveraineté. En rappeler les contours, en comprendre les fondements et chercher à l’inscrire dans un contexte géopolitique international qui en fait une priorité pour ce siècle ne sont donc pas un luxe.
Le fléau de la pêche illégale
Pour bien appréhender le caractère particulier de la lutte contre la pêche illégale, il n’est pas nécessaire de remonter aux origines de la pêche – cela nous emmènerait à la Préhistoire – si ce n’est pour rappeler l’évidence que la pêche a précédé le commerce et le transport maritimes. Il suffit de mentionner qu’assez rapidement, cette activité portait en elle l’appropriation d’un espace maritime et de ses ressources halieutiques. Lorsque les communautés humaines ont commencé à s’organiser en cités ou en royaumes, pour ne faire référence qu’à la Méditerranée antique, à l’Inde ou à l’Asie de la même époque, les zones de pêche étaient déjà l’expression d’un rayonnement et d’une puissance depuis le port base. Par extension, ces zones d’influence se sont appliquées au commerce maritime. Les tensions nées de la rencontre de flottes concurrentes ont pu nourrir le déclenchement des hostilités. Il en fut ainsi par exemple lors de la première guerre punique, lorsque Rome et Carthage se retrouvèrent face à face dans un espace maritime libéré de l’influence grecque et devenu trop étroit. Les liens historiques entre les flottilles et les ports de pêche avec la marine de guerre, pour constituer des équipages ou les neutraliser avant les conflits, sont un autre exemple.
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