Military History–Flux and Reflux of Islam Up Until the Iranian Revolution
Histoire militaire - Flux et reflux de l’islam jusqu’à la Révolution iranienne
Contrairement aux autres religions du Livre, chrétienne et juive, l’islam a d’emblée connu la victoire et l’expansion : en l’espace d’un siècle, de l’Egire en 622 à la bataille de Poitiers en 732, la communauté des croyants, l’oumma a avalé les royaumes de la péninsule arabique, les deux tiers de l’empire byzantin, l’empire perse sassanide et les États vandale et wisigoth. Un reflux de l’islam ne peut indiquer, aux yeux des croyants, que la colère (passagère) de Dieu et partant, toute terre musulmane perdue doit être reconquise.
Jusqu’au XIVe siècle, cette donnée historico-mystique se vérifie. L’Inde, le Turkestan, Constantinople, l’Europe danubienne (jusqu’à Vienne), l’Afrique (jusqu’au sud du Sahara), l’Insulinde sont rassemblés par la force au Dar al-Islam (Maison de l’Islam). La perte de la Sicile et de l’Espagne maure (al-Andalus) est douloureuse, mais contrebalancée par le rejet des Croisés à la mer et la conversion des terribles conquérants mongols qui avaient fait décapiter le calife à Bagdad au XIIIe siècle. Au XVIIe siècle, l’expansion musulmane stoppe brutalement. Après Lépante et la défaite sous les murs de Vienne, un reflux inimaginable se produit : la Maison de l’Islam quasi tout entière tombe dans la dépendance de l’Occident chrétien. Au début du XXe siècle, les Turcs ont été refoulés d’Europe ; les Russes ont conquis l’Ukraine, le Caucase et l’Asie centrale ; les Français contrôlent l’Afrique du Nord, les Hollandais l’Indonésie et les Britanniques gouvernent l’Inde, l’Égypte et jusqu’aux confins de l’Arabie. Le traumatisme créé par ce reflux ne saurait être sous-estimé. Car, pour un musulman, l’Occident n’est pas seulement chrétien, c’est-à-dire infidèle, il est immoral, dans la mesure où il émancipe les femmes. C’est le règne du Démon. L’islam se mobilise dès lors pour la guerre sainte, le djihad, double combat contre le mal et contre l’infidèle. Parallèlement, à compter du XVIIIe, des mouvements intégristes voient le jour, notamment le wahhabisme dans la péninsule Arabique qui se trouvera à l’origine de l’État saoudien et le naqshbandisme aux Indes qui donnera naissance aux États pakistanais et bengali ou le senoussisme dont le colonel Kadhafi se réclamait.
En 1908, la révolution « jeune turque » vise à transformer l’empire ottoman en un État nation sur le modèle des États européens. Simultanément, elle prêche l’union et la solidarité de tous les musulmans. L’idée du djihad et de la nécessité d’une revanche de l’islam marque même les Arabes chrétiens, nombreux en Syrie, au Liban et en Égypte. Le parti Baas a été créé en 1953 par un Syrien chrétien, Michel Aflaq, qui écrit : « Toute nation possède une force motrice essentielle. Chez les Arabes, cette force motrice fut la religion au moment de l’apparition de l’islam. La religion a été capable de révéler les forces latentes des Arabes, de réaliser leur unité ». Le concept de djihad débouche sur une autre conclusion, plus inattendue encore : toute force concourant à la lutte des musulmans contre des non-musulmans est bonne. Tout ce qui affaiblit l’Occident est bon, même si l’islam se trouve, en première analyse, « bousculé ». C’est le cas de Mustapha Kemal, le seul officier « Jeune Turc » à oser, dès 1908, concevoir une séparation complète entre l’État et la religion. À partir de 1920, sous couvert de la guerre nationale, il applique son programme : abolition du sultanat, puis du califat et mise en place d’une république laïque, avec émancipation de la femme et port obligatoire du costume européen. À ce titre, Atatürk aurait dû être considéré comme un renégat. Au contraire, c’est un héros dans tous les pays musulmans : en effet, en chassant définitivement les Grecs d’Anatolie, il a en fait vaincu des chrétiens. Il est le « Ghazi », le vainqueur, le premier musulman depuis les sultans du XVIIe siècle à avoir remporté une victoire.
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