Le développement du Geoint ouvre de nouvelles perspectives majeures pour la fonction stratégique « Connaissance et anticipation ». Le fusionnement d’informations géo-référencées propose un élément de puissance et d’influence, à condition de s’en donner les moyens techniques, procéduraux mais aussi humains.
Geospatial Intelligence et géopolitique : aspects d’une révolution en cours
Geospatial Intelligence and Geopolitics: Aspects of a Current Revolution
The development of Geoint (Geospatial intelligence) opens up major new perspectives for the strategic function (stated in the Livre blanc) of knowledge and anticipation. The merging of geo-referenced information offers an element of power and influence on the condition that we provide ourselves with the technical, procedural and human resources it needs.
Le Geospatial Intelligence est un domaine d’activité en plein essor dans les armées françaises mais relativement méconnu. Il se définit non comme le voudrait la traduction par « renseignement géospatial » mais par fusion de données multicouches et multicapteurs. Mis en œuvre aux États-Unis depuis les années 1990 suivi de l’Angleterre et de l’Allemagne, il tend à se développer en France en cohérence avec le pilier stratégique « Connaissance et anticipation » défini dans le Livre blanc en 2008. Il représente une véritable révolution technologique, culturelle et institutionnelle en cours par la manière de concevoir et de produire l’information géolocalisée. Comment la révolution Geospatial Intelligence conduit-elle à apporter une meilleure aide à la décision ? Trois aspects sont abordés : l’essor du Geoint, son apport pour une meilleure qualité de l’information et les défis en cours pour l’armée française.
L’essor du Geospatial Intelligence comme élément de puissance militaire
La naissance et l’essor du Geoint aux États-Unis
Le Geoint américain se développe dans la continuité des progrès technologiques géospatiaux depuis les années 1960 et dans le contexte géopolitique de la « fin de la guerre des étoiles » contre l’URSS. Il est lié à la recherche de la Global Information Dominance grâce au progrès des nouvelles technologies de l’information et de la communication à usage militaire (précision du ciblage, réseaux connectés), l’usage croissant des satellites, l’accélération du processus décisionnel, boucle OODA (observation, orientation, décision, action), la redécouverte de l’environnement humain dans la guerre de contre-insurrection et la lutte contre le terrorisme. La National Geospatial-Intelligence Agency (NGA) qui remplace en 2003 la National Imagery Mapping Agency (1996) et emploie 14 000 personnes environ, se spécialise dans le processus de fusion d’informations dit Multi-Int. Elle s’inscrit en outre dans un véritable écosystème Geoint qui intègre les universités et les groupes industriels, sans jamais cesser de monter en puissance depuis sa création.
Le Geoint ou la fusion de données
La particularité majeure de la révolution Geoint en cours réside dans l’importance accordée à l’approche géographique dans sa dimension physique et humaine au profit du renseignement. La doctrine Geoint américaine produite par la NGA en 2006 et 2012 le met en évidence : « Le Geoint est l’exploitation et l’analyse de l’imagerie et de l’information géospatiale pour décrire et visualiser les facteurs physiques et les activités géolocalisées sur Terre » (1). Elle retient d’ailleurs trois éléments essentiels : l’imagerie produite par les aéronefs (drones, avions, plateformes, satellites) qui permet de visualiser des données, le renseignement imagerie (interprétation de l’image) et l’information géospatiale (information géolocalisée).
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