Les Présidents des États-Unis - Histoire et portraits
Les Présidents des États-Unis - Histoire et portraits
Maintenant que le 45e Président des États-Unis vient de s’installer à la Maison-Blanche, il est intéressant de se replonger dans l’histoire de ses prédécesseurs, exercice qui ne manque ni de piquant, ni d’intérêt. Bien sûr, il y a peu de choses en commun entre les géants des premières années de la république américaine, qui n’avaient pratiquement aucun moyen, en personnel, en finances et en locaux, et le Président actuel.
Au fil des décennies, l’exercice du pouvoir a considérablement évolué, mais ce qui est resté pratiquement identique est que le Président est peu à peu devenu le symbole de la Nation, son illustre représentant, le décideur suprême, l’homme considéré longtemps comme le plus puissant du monde. Depuis George Washington, le 30 avril 1789, qui se limita volontairement à deux mandats, quarante-quatre Présidents se sont succédé à la Maison-Blanche, deux fois plus qu’en France par exemple pour une période identique !
Instruits comme Wilson, diplômé de Princeton, raillé par Georges Clemenceau qui connaissait bien l’Amérique comme « un autre Jésus Christ venu sur Terre pour changer les hommes » ou autodidactes comme Lincoln, qui incarna les plus nobles valeurs de l’Amérique durant la tragédie que fut la guerre civile, nés dans des cabanes en rondins du Midwest ou grands aristocrates de la côte Est, militaires, avocats ou encore ingénieurs, tous ont marqué les États-Unis de leur empreinte. Les noms des plus illustres, tels Theodore Roosevelt (TR), Franklin Delano Roosevelt (FDR) et John Fitzgerald Kennedy (JFK) ont bâti la mémoire collective. Qui n’a jamais entendu parler du Watergate et de Nixon, de Reagan le « grand communicateur » ou encore de « W » Bush, fils de l’un des plus vilipendés ? Qui a oublié les assassinats de Lincoln au théâtre Ford à Washington ou celui, plus récent, de Kennedy à Dallas, en novembre 1963, événement qu’Edgar Morin qualifia alors de tragédie télévisuelle planétaire ? Cette galerie de portraits met aussi en lumière ceux que la postérité a négligés, comme John Tyler, James Buchanan, Grover Cleveland ou Herbert Hoover. Des one term presidents aux quatre mandats de Roosevelt.
Georges Ayache, ancien diplomate, historien de formation et universitaire, retrace le parcours de ces personnalités et dresse le bilan de leur action. Dans sa diversité, l’histoire de ces Présidents américains fait écho à celle de l’Amérique, avec ses vertus et ses excès, ses ombres et ses lumières. Il est vrai que la montée en puissance de la Maison-Blanche est loin d’avoir été linéaire, fragilisée qu’elle a été longtemps par le leadership du Congrès qui définissait la politique de la Nation par l’élaboration des lois, tout en brandissant contre le chef de l’exécutif la menace de la coercition suprême : la destitution ou impeachment. C’est Lincoln, durant la guerre civile, qui commença à changer la donne, en suspendant l’habeas corpus sans en référer à l’instance législative, au nom de la nécessité publique et de l’exigence populaire. Le tournant sera amorcé par Theodore Roosevelt dont l’objectif fut d’accroître le pouvoir exécutif afin de réguler l’économie comme de clarifier le rôle international de l’Amérique. Mais il incomberait à un autre Roosevelt, Franklin, de rendre cette évolution irrésistible en associant le renforcement de la présidence à l’émergence d’un État providence (Welfare State) qui n’était, à la fin, que la conséquence rationalisée des échecs du libéralisme.
C’est à partir de cette période que des historiens à l’instar de Nigel Hamilton, se mirent à évoquer des « Césars américains ». Franklin Delano Roosevelt, le Président qui avait sans doute le mieux cerné les arcanes de la Maison-Blanche, avait raison de prétendre que la présidence n’est pas simplement un bureau administratif, elle est surtout le lieu du leadership moral. Georges Ayache résume fort bien le destin des Présidents américains : « S’il n’en fait pas de surhommes ou des thaumaturges, contrairement à ce qu’en attend trop souvent l’opinion publique, du moins peut-il faire d’hommes apparemment quelconques les intercesseurs privilégiés du destin ». Ce n’est pas le moindre des miracles que permet le grand rêve américain. C’est le rôle du Président américain comme chef des armées, ou de leader du monde occidental, au moins jusqu’aux années 1970-1980, qui retiendra l’attention et permet de distinguer les « grands Présidents » des autres. Enrichie d’une solide bibliographie ainsi que d’un bien utile glossaire, cette histoire des Présidents américains réalise le tour de force d’être claire, complète et suggestive.