Depuis les révolutions arabes de 2011, les monarchies arabes du Golfe ont fait preuve d’ambitions stratégiques qui ne leur étaient guère connues jusqu’ici. Leur activisme diplomatique sur le dossier syrien mais aussi l’usage de la force – au Bahreïn, en Libye et plus récemment au Yémen – attestent d’une volonté des membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG) de devenir des acteurs stratégiques à part entière. Pour certains observateurs de la région tels que le professeur émirien Abdulkhaleq Abdulla, nous vivons ainsi un « Gulf moment » qui structurerait politiquement et économiquement le monde arabe.

Si ces ambitions des monarchies du CCG sont réelles, peuvent-elles pour autant permettre de consolider une architecture de sécurité régionale qui fait encore défaut ? Longtemps, l’idée de défense collective dans la péninsule Arabique a semblé chimérique et ce, en raison de multiples facteurs : des armées locales trop faibles, une forte dépendance aux puissances occidentales (États-Unis, Royaume-Uni et France) et de fréquents désaccords entre les États du Golfe sur la structure et les objectifs d’une défense collective locale.

Toutefois, un certain nombre de mesures et d’annonces au cours des dernières années semble indiquer une évolution du CCG en tant qu’organisation de sécurité régionale. L’idée d’une Otan du Golfe est par ailleurs fréquemment évoquée, tant par les experts que par les décideurs. Dans cette perspective, cet article met volontairement de côté les problématiques politiques pour poser la question de la faisabilité d’une Otan du Golfe. En d’autres termes, il s’agit d’identifier les domaines dans lesquels le CCG pourrait et devrait s’investir afin de renforcer ses capacités dans le secteur de la sécurité régionale. Par ailleurs, alors que le président américain Donald Trump a annoncé sa volonté de rediscuter les termes des engagements américains dans le monde, le moment semble opportun pour évaluer les efforts des monarchies de la péninsule Arabique afin d’assurer leur propre sécurité.