Étudier la guerre a longtemps été compliqué en France avec la méfiance entre les mondes académique et militaire. Sous la pression de la réalité stratégique, les « war studies » deviennent performantes avec l’impulsion des acteurs institutionnels comme le ministère de la Défense, les Universités, les militaires et les chercheurs.
Le tournant des études sur la guerre en France
A Turning Point in War Studies in France
The study of warfare has long been a thorny issue in France, given the degree of mistrust that has existed between the academic and military worlds. Under the pressure of contemporary strategic reality war studies are becoming more effective, and are supported by institutional players such as the Ministry of Defence, universities, military personnel and researchers.
« Il est rare, depuis de longues années, que des professeurs consacrent leur temps et leur réflexion aux problèmes proprement militaires. Cette lacune, pour être traditionnelle, n’en est pas moins fâcheuse.
Dans l’enseignement de la science politique et de l’histoire, l’étude des institutions militaires, des rapports entre ces institutions et les États ou les régimes sociaux aurait dû occuper une place plus large que celle qui lui a été effectivement accordée. Il était déplorable de mettre le récit des batailles au premier rang, il serait déraisonnable d’oublier que les guerres ont été, à travers les siècles, un phénomène endémique et que les instruments de combat, au même titre que les outils de travail, sont à la fois l’expression d’une société et un des facteurs qui en commandent l’organisation. De plus, dans une démocratie, la défense nationale concerne directement le citoyen. Pourquoi celui-ci ne s’efforcerait-il pas d’acquérir assez de connaissances pour comprendre les problèmes ? Ce qui s’impose en fait d’économie n’est pas moins nécessaire en fait de stratégie. Probablement le manque de communication entre universitaires et officiers, les soupçons que des crises multiples leur ont inspirés les uns à l’égard des autres expliquent cette lacune de notre enseignement.
Cette lacune est aujourd’hui à la fois plus visible et plus grave (…). Jadis, (…) on préparait la guerre en temps de paix, mais on faisait la distinction entre la paix et la guerre et l’on admettait à l’avance qu’il y aurait une distinction nette entre l’une et l’autre. Il n’en va plus de même à l’heure présente ».
Raymond Aron, Le Grand débat. Initiation à la stratégie atomique ; Paris, Calmann-Lévy, 1963.
Ces lignes de Raymond Aron, plaidant pour l’étude de la guerre à l’université, restent d’une actualité frappante – même si, et l’auteur en serait sans doute ravi, les choses commencent à changer. Ces dernières années s’est constitué un véritable mouvement en faveur de « War Studies » à la française, animé par une poignée d’universitaires et soutenu par le ministère de la Défense.
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