Outre l’attachement à l’ordre et à la stabilité, et la volonté de mettre hors d’état de nuire les djihadistes du Caucase ou d’Asie centrale, Vladimir Poutine considère Bachar Al-Assad comme le rempart contre le terrorisme islamique. Certes, la Russie n’a pas gagné la « guerre », mais les guerres de Syrie sont dans une nouvelle phase.
L’intervention de la Russie dans le conflit syrien
Russian Intervention in the Syrian Conflict
In addition to his commitment to order and stability, and his will to prevent the jihadists of the Caucasus and Central Asia from doing further damage, Vladimir Putin sees Bashar al Assad as a rampart against Islamic terrorism. Whilst Russia has not won the war overall, the wars in Syria have entered a new phase.
Au moment où nous rédigeons cet article, dans les premiers jours d’avril 2017, les événements qui ont suivi l’attaque chimique contre Khan Cheikhoun dans la province d’Idlib, une des seules demeurant aux mains des rebelles, dont certains successeurs d’Al-Qaïda, apparaissaient de nature à altérer les résultats obtenus par les trois mois d’efforts entrepris par la diplomatie russe en vue d’apporter une solution politico-diplomatique au drame syrien. Tout le monde s’interrogeait déjà sur le point de savoir si le succès militaire remporté à Alep-Est par l’armée syrienne aidée par l’aviation russe, et appuyée au sol par son allié iranien, avec ses 76 milices pro-iraniennes, serait suivi à terme d’une percée diplomatique avalisée par la communauté internationale. En l’état, il est difficile de se prononcer sur ce point, trop d’inconnues persistent, au premier chef desquelles figure la politique qu’adoptera l’Administration Trump au lendemain de la frappe à laquelle elle a procédé, dans la nuit du 6 au 7 avril 2017.
Pluralité des motifs d’intervention
Une pluralité de facteurs explique l’engagement de Moscou sur le théâtre syrien. Il s’est tout d’abord agi de minimiser les conséquences du conflit ukrainien, en tentant de briser l’isolement dans lequel la communauté euro-atlantique a cherché à la confiner. Moscou n’a jamais dissimulé son intention de se voir reconnaître un statut égal à celui des Américains et de s’asseoir à la même table de négociations, alors que Barack Obama avait qualifié la Russie de « puissance régionale ».
La diplomatie russe a fait valoir que le régime de Damas, et non le seul Bachar Al-Assad, sa famille et son clan, reste le seul rempart contre le terrorisme islamique. Ayant beaucoup investi dans ce pays, la Russie a cherché à y sauvegarder ses positions en préservant ses uniques points d’ancrage en Méditerranée, en premier lieu le port de Tartous, devenu après la rupture avec l’Égypte, en 1972, le principal port d’attache de la 5e escadre russe, l’Eskadra, en Méditerranée. Il a pour dénomination officielle « Point d’appui matériel et technique » (PMTO n° 720) et représente une superficie de 2,3 hectares. À cela s’ajoute le port de Lattaquié, où, à la fin des années 2000, eurent lieu des travaux d’élargissement et de construction d’un embarcadère. Mais c’est peut-être la station d’écoute de Tel Al-Hara, située dans la province de Deraa (d’où est parti le mouvement populaire contre le régime en mars 2011) qui revêt la plus grande importance. Opérée par le GRU, cette station couvre un vaste espace allant de la Turquie jusqu’à la mer Rouge et du canal de Suez aux confins de l’Afghanistan, en passant par Djibouti, zone d’implantations militaires multiples et croissantes. Le 5 octobre 2014, ce centre C a été investi par les soldats de l’Armée syrienne libre (ASL) après que les équipements aient été démantelés et le personnel évacué. On estime que la Russie opère deux autres centres d’écoute et d’interception sur le territoire syrien. Ajoutons également que la Russie a renforcé sa présence sur deux bases aériennes au centre de la Syrie, à Al-Tyas, ville située à 60 km de Palmyre, et à Cha’irat, située à 40 km au Sud-Est de Homs. Ces bases lui permettent d’occuper des positions plus centrales, celle de Hmeimim près de Lattaquié étant trop éloignée des zones désertiques entre Palmyre et Deir ez Zor que les forces syriennes voudraient reconquérir avec l’aide de la Russie.
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