L’envoi d’un satellite puis d’un cosmonaute a été crucial pour l’image de l’Union soviétique comme superpuissance. Soixante ans plus tard, le pouvoir russe souligne l’importance du secteur spatial devenu un indicateur de compétences technologiques mais aussi de la politique d’influence sur la scène internationale.
La Russie à la reconquête de sa puissance spatiale
Renewed Russian Conquest for Power in Space
Putting a satellite, and later a cosmonaut, into space was crucial for the image of the Soviet Union as a superpower. Sixty years later, Russian leaders are again highlighting the importance of the space sector as an indicator of technical competence and of a policy of international influence.
Les compétences spatiales de la Russie sont volontiers évoquées dans les discours politiques du président Poutine comme un attribut de puissance qu’il convient de protéger et développer. C’est ainsi que, le 4 mars 2017, le chef de l’État russe a souligné, à l’occasion des vingt-cinq ans de la création de l’Agence spatiale russe, l’apport de l’industrie spatiale au renforcement de la sécurité nationale. Cette approche s’inscrit dans une perspective plus large, les réalisations spatiales étant aussi mobilisées comme un indicateur de modernité et de progrès devant attester de l’affirmation de la présence russe sur la scène internationale. Cette ambition affichée n’ignore toutefois pas le poids des défis qui restent à relever.
En effet, alors que l’Union soviétique a été la première à envoyer un objet artificiel, puis un homme, dans l’espace et à construire ainsi l’image d’un acteur décisif de la conquête de l’espace, il est plus difficile en 2017 de déterminer le rang de la Russie au sein des puissances spatiales. De fait, à côté de points forts indéniables qui ont été préservés, des faiblesses récurrentes demeurent (1). L’espace fait toujours partie des atouts de la Russie, mais il convient de mettre en perspective ses réalisations afin de mesurer les capacités réelles du secteur et son rôle dans le projet national. Cette analyse se fera en trois temps, au travers de l’étude des compétences spatiales actuelles de la Russie, de la nouvelle organisation du secteur et, enfin, des choix stratégiques qui sous-tendent aujourd’hui la politique spatiale russe.
La Russie dans la hiérarchie des puissances spatiales
La Russie détient incontestablement une place à part sur la scène spatiale internationale. Elle est l’une des premières puissances de ce club très fermé puisqu’elle maîtrise la gamme complète des missions, tant civiles que militaires. Certes, ses performances sont bien moindres que celles des États-Unis, en particulier pour les systèmes militaires, mais elle possède des créneaux de compétence uniques. C’est ainsi qu’elle est inévitable au niveau mondial dans le domaine des vols habités puisqu’elle est seule à desservir la station spatiale internationale depuis le dernier vol de la navette américaine en juillet 2011 et jusqu’au moins 2018, date prévue pour la mise en service des nouveaux vaisseaux privés américains affrétés par la NASA. Quant à la Chine, si elle est le seul autre État capable, en 2017, de faire voler ses propres ressortissants, ce n’est que de façon discontinue et pour de courtes durées, et il en sera ainsi au moins jusqu’en 2022, date attendue de la mise en service de sa propre station spatiale.
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