L’armée russe s’apprête à recevoir une nouvelle génération complète de matériels blindés, dont la conception tient compte des opérations réalisées ces trente dernières années et des besoins export. Plus lourds et mieux armés que les précédents, leur conception innovante marque un tournant pour l’industrie russe.
Le renouvellement de la flotte de blindés : un investissement pour moderniser l’armée russe
Renewal of Armour: Investment to Modernise the Russian Army
The Russian army will soon receive a completely new generation of armoured vehicles whose design takes account of experience of the past thirty years of operations and also of export needs. They are heavier and better armed than their predecessors and their innovative design marks a significant change for Russian industry.
Pendant plus de quarante ans, les observateurs et experts du domaine terrestre ont examiné les évolutions incrémentales des chars T (T64/72/80/90), des transports de troupes BTR (60/70/80) et autres véhicules de combat d’infanterie BMP (1/2/3). Depuis le défilé du 9 mai 2015 sur la Place rouge, ils tentent d’en connaître le plus possible sur la toute nouvelle génération de blindés, qui comporte cinq nouvelles plates-formes d’architecture novatrice et de technologies avancées : le char T14 (1), le véhicule de combat d’infanterie (VCI) lourd T15, l’automoteur d’artillerie Koalistiya, le véhicule de transport de troupes (VTT) Kurganets et le VCI à huit roues « 8x8 Boomerang ». À cette panoplie il convient d’ajouter la famille des robots de combat que l’armée russe expérimente en Syrie. Cette régénération complète ne trouve d’équivalent qu’en Chine, où les matériels modernes de tous types entrent en service à une cadence vertigineuse. Elle tranche avec la situation de l’armée américaine. Celle-ci ne s’est toujours pas remise des fiascos programmatiques du Pentagone dans lesquels se sont perdus pas moins de cinq projets majeurs (2), ce qui l’a contrainte à moderniser pour la énième fois ses chars M1 Abrams, ses vieux automoteurs M109 Paladin et ses VCI Bradley.
Un développement soutenu par le marché intérieur et l’export
Ce renouvellement de la flotte des blindés russes correspond à deux besoins. Le premier est la remontée en puissance des forces terrestres russes, dont les matériels ont montré de notables insuffisances en Afghanistan, en Tchétchénie, en Géorgie, et récemment dans l’Est de l’Ukraine et en Syrie. Ces mêmes obsolescences ou insuffisances capacitaires furent aussi notées par les clients étrangers des matériels russes. Cela concerne principalement les protections balistiques face aux mines et engins explosifs improvisés (EEI), les conduites de tir et l’ergonomie d’emploi.
Le deuxième besoin est celui de l’export car la Russie tient des positions très fortes en Afrique du Nord (Algérie, Égypte), en Inde et dans les républiques d’Asie centrale. Or, les blindés de transports (BTR suivant l’abréviation russe) et autres véhicules de combat d’infanterie BMP sont totalement surclassés par les nouveaux 8x8 occidentaux, turcs ou sud-africains. Seul le char T90 dans ses versions modernisées possède encore une valeur commerciale reconnue en raison de son prix imbattable mais le client doit accepter d’évoluer dans un char dont l’architecture de base remonte aux années 1960. Avec le massif réarmement asiatique et le maintien de budgets substantiels dans l’arc de crise centré sur le monde musulman, les contrats sont à prendre maintenant, pas dans vingt ans. Si on ajoute à ce panorama commercial le plan de modernisation de l’armée indienne, qui recherche un nouveau VCI amphibie, un char de nouvelle génération et un 8x8 de transport de troupes, on comprend mieux la convergence des calendriers. Le corps blindé mécanisé indien repose sur les BMP1/2, les chars T72 Areya et T90 produits sous licence. La présence industrielle russe y est très forte.
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