Editorial
Éditorial
La stratégie se construit sur la combinaison des temps, entre-temps long s’appuyant sur la connaissance du passé pour mieux préparer l’avenir, et temps court où l’action s’impose désormais avec en toile de fond la pression politique et médiatique sur les décideurs. C’est alors une contradiction permanente pour le commandeur confronté à des choix d’autant plus difficiles que les ressources sont comptées.
À cet égard, le choix de Paris 2024 en est une illustration paradoxale. Au regard du tempo des chaînes d’informations continues, 2024 c’est encore très loin ! Mais pour ceux qui vont conduire le projet, la course contre le chronomètre est désormais engagée.
Il en est de même pour l’outil de défense de notre pays, engagé au quotidien dans la protection des Français, de nos intérêts et de nos valeurs, avec des contraintes telles qu’elles se sont cristallisées en juillet en une crispation politique. En même temps, il s’agit de préparer cet outil pour répondre aux menaces de demain, dans un monde en déséquilibre où désormais les ambivalences alimentent les surprises stratégiques. C’est l’objet des travaux en cours qui vont définir les ambitions et les moyens nécessaires, avec un calendrier lui-même sujet à discussion, voire à l’inquiétude, si les retards s’accumulent en particulier pour les programmes d’armement, d’autant plus que les lacunes capacitaires clairement identifiées depuis des années sont hélas une réalité pressante pour les forces très fortement sollicitées depuis plusieurs années.
La revue stratégique en cours, suivie ensuite par la Loi de programmation militaire 2019-2024, doit permettre cette réflexion sur la notion d’engagement dont les formes sont autant individuelles que collectives. C’est le sujet de ce dossier de rentrée proposant des approches, très différentes à première vue mais très complémentaires, pour illustrer cette convergence des efforts, avec une évidence commune, la réalité de la violence de la guerre – quelle qu’en soit sa forme. Les attaques terroristes djihadistes démontrent ainsi cette volonté, non seulement de tuer, mais également de remettre en cause – par le sang – notre modèle politique, social et culturel.
Mais il ne faut pas oublier que d’autres incertitudes stratégiques pèsent sur notre défense et notre sécurité. La résurgence d’empires aux exigences nationalistes revendiquées souvent pour renforcer la cohésion interne incite ainsi à accroître les tensions d’autant plus que la prolifération nucléaire et balistique a été de facto relancée avec la crise nord-coréenne. La notion de rapport de force – le « hard power » – oubliée par ceux qui croyaient aux dividendes de la paix – et au « soft power » – reste indéniablement l’un des éléments de régulation des relations internationales. Cela exige donc un effort réel pour notre pays pour qu’il puisse rester un acteur crédible sur la scène internationale, maître de son destin tout en proposant un modèle d’engagement au service de la paix.