Les empires sont de retour. Pas ceux démantelés à l’issue de la Seconde Guerre mondiale et les conflits de décolonisation mais de nouveaux empires traduisant des ambitions souvent déstabilisatrices. Avec une démographie encore forte, la Chine est le premier exemple d’une puissance impériale en pleine expansion.
La résurgence des empires (1/2) : Chine, le retour du Céleste Empire
The Resurgence of Empires(1/2): China, the Return of the Celestial Empire
Empires are back. Not those that were dismantled as a result of the Second World War and the wars that led to decolonisation, but new ones often driven by destabilising ambitions. With its strong demography, China is the prime example of an imperial power in full expansion.
Le monde multipolaire qui allait suivre la disparition de l’Union soviétique tendait à la mondialisation économique des échanges commerciaux entre nations. Une croissance économique devait réduire les disparités et instaurer une ère de prospérité. Entre 1994, date de la conclusion du cycle de l’Uruguay de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et 2014, la valeur du commerce mondial des marchandises a presque quadruplé, atteignant 19 000 milliards de dollars en 2013 contre 5 000 milliards en 1996. Elle est retombée en 2016 à 16 000 milliards, soit plus du triple de la valeur de 1996. Cette croissance a été corrélée avec celle des produits intérieurs bruts (PIB) par habitant dans le monde depuis le début des années 1960, avec une exception notable entre 2007 et 2010. Or, ce dernier indicatif de croissance a dépassé celui de la croissance démographique depuis les années 1980 et ce, pour la première fois depuis l’an 1000.
Mais ce monde de libre-échange économique multilatéral développe parallèlement une persistance des régionalismes qui entrent en compétition les uns avec les autres. Au 20 juin 2017, 279 accords commerciaux régionaux étaient en vigueur. Ils correspondaient à 445 notifications présentées par les membres de l’OMC. Cet indice des cristallisations géographiques peut augurer du refractionnement du monde.
En effet, un facteur de refractionnement vient accroître le niveau de complexité de la réalité internationale, celui de la renaissance des empires dans le paysage géopolitique contemporain. Elle profite de la fragilité d’États contigus à des États conquérants, eux-mêmes contraints à une expansion territoriale ou maritime par leur propre croissance démographique, aggravée par les premiers effets profonds de changement climatique et d’épuisement de leurs ressources naturelles. « Les changements climatiques occasionneront des mouvements de populations en faisant de certaines régions de la planète des lieux beaucoup moins vivables, en rendant moins sûr l’approvisionnement en nourriture et en eau, et en aggravant la fréquence et la violence des inondations et des tempêtes » écrivait en 2008 l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et l’OIM ont tenté de quantifier les flux de migrants climatiques futurs et la prédiction la plus fréquente était alors de 200 millions d’ici à 2050. Toutefois, les estimations actuelles vont de 25 millions à 1 milliard d’individus d’ici à 2050. La FAO (Food and Agriculture Organisation) a, quant à elle, évalué la situation réelle : « En 2015, il y a eu 244 millions de migrants dans le monde, ce qui représente une hausse de 40 % depuis 2000. Ce chiffre inclut les 150 millions de travailleurs migrants. Environ 40 % des transferts d’argent sont destinés aux zones rurales, ce qui traduit les origines rurales d’un nombre important de migrants. »
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