Editorial
Éditorial
Le projet de Loi de programmation militaire 2019-2025, présenté le mois dernier, a été décrit comme à « hauteur d’homme ». Ambitieux mais réaliste, audacieux mais pragmatique. Cette dimension à « hauteur d’homme » reflète la prise de conscience que, depuis des années, le personnel militaire et civil du ministère a encaissé et subi de nombreuses réformes tout en étant engagé opérationnellement dans des théâtres exigeants, y compris sur le territoire national. Avec le prix du sang, comme le démontrent les dix militaires morts en service ou en opération depuis le 1er janvier !
Prendre en compte les besoins du personnel est devenu une priorité, car sans les hommes et les femmes des armées, directions et services, point de Défense crédible. C’est un des axes prioritaires de la politique du ministère des Armées avec notamment le « Plan famille » dévoilé récemment. C’est la raison pour laquelle la RDN a souhaité proposer un dossier sur la condition militaire vue sous différentes approches permettant d’appréhender une question complexe, ne serait-ce que par la diversité de la communauté défense. Il en ressort cependant que la dégradation des conditions d’exercice du métier des armes a été une réalité depuis des années avec un effort demandé au personnel sans réelle compensation. Le rattrapage décidé est la juste reconnaissance de ce besoin avéré et qui doit s’inscrire dans la durée. C’est aussi une nécessité si notre pays veut conserver une ambition pour sa défense en s’appuyant sur un recrutement de qualité et donc une fidélisation du personnel qui peut avoir de nouvelles exigences sociétales, en particulier pour la grande part de militaires contractuels qui contribuent à l’essentiel des effectifs sous l’uniforme.
Renforcer notre Défense, c’est répondre à un environnement stratégique incertain et dangereux. Il en est ainsi des relations autour de l’espace russe, que ce soit dans le Grand Nord ou avec l’Ukraine. S’agit-il d’une nouvelle guerre froide basée sur une rivalité idéologique ou d’une confrontation de nature différente ? Il est vrai que le dialogue est aujourd’hui difficile et s’inscrit dans un rapport de force remettant en avant les États-puissance. Le soft power vanté par certains n’est crédible que s’il s’appuie sur du hard power. L’Union européenne en a pris conscience récemment et s’efforce désormais de combler ses lacunes capacitaires, même si le dialogue avec l’Otan – et donc Washington – n’est pas simple comme l’a démontré la récente conférence de Munich sur la sécurité. À cet égard, le Brexit oblige Londres à réagir, y compris dans la relation bilatérale avec Paris dans le domaine de la défense qui constitue cependant un atout solide dans un monde en déséquilibre.
C’est aussi la signification qu’une Défense se construit dans la durée tant pour les grands programmes structurants que pour la condition militaire, gage indispensable de l’efficacité opérationnelle. ♦
NDR : je remercie particulièrement le contrôleur général des armées Patrick Macary pour son aide apportée dans la constitution du dossier sur la condition militaire.