Comme le rappelle le général d’armée Jean-Philippe Wirth, dans son ouvrage intitulé La condition militaire ⁽¹⁾, les armées de la République sont au service de la Nation et ont pour mission de préparer et d’assurer la défense de la patrie. Si, à partir de la fin de la Seconde Guerre mondiale, le lien existentiel qui existait jusqu’alors entre le soldat et la société a commencé à se distendre, du fait du contexte international et des évolutions sociétales, l’apparition brutale d’une menace terroriste sur le territoire national a remis les questions de défense au centre des préoccupations des Français. Depuis 2015, le soldat est de nouveau perçu comme une figure protectrice pour une majorité de nos concitoyens.

La spécificité du métier militaire, impliquant un contingentement juridique auquel est associé un certain nombre d’obligations et sujétions, est compensée par des garanties et des compensations que la Nation accorde aux militaires. La spécificité militaire et la condition militaire ⁽²⁾ qui lui est associée ne peuvent être perçues comme légitimes que si les Français, dans leur grande majorité, considèrent celles-ci comme avérées et justifiées. À un moment où l’engagement opérationnel des armées reste très élevé, tant en opérations extérieures que sur le territoire national, il est donc intéressant d’analyser la manière dont les Français perçoivent le métier militaire aujourd’hui.

De manière générale, les armées bénéficient en France d’une très bonne image dans l’opinion publique, en particulier chez les jeunes, qui continuent de percevoir le métier militaire comme un travail à part, à la fois dangereux et valorisant. Nombre de travaux récents montrent l’existence en France d’une tension forte, voire d’une sorte de paradoxe, entre d’un côté une attente d’ordre dans l’espace public, et une demande de liberté dans l’espace de vie personnelle et privée. Toute la gageure pour les armées va être, dans les années à venir, de concilier ces deux aspects contradictoires, si elles veulent pouvoir continuer à attirer des hommes et des femmes de qualité dans leurs rangs. C’est sur ce point que la condition militaire, en tant que politique publique, entre en ligne de compte et a son rôle à jouer.