L’Armée de terre est confrontée à des ennemis en mutation permanente. Elle est dès lors naturellement tournée vers l’innovation pour gagner ses combats. Cela exige de combiner la projection sur le temps long et les défis de la boucle courte avec une capacité améliorée à développer au plus vite des projets innovants répondant au besoin opérationnel.
Innover pour vaincre aujourd’hui et demain (pour une innovation à hauteur d’hommes)
Innovation to Win Today and Tomorrow (Innovation Worthy of Man)
The Army faces enemies of ever-changing nature and quite naturally looks to innovation to win its fights. That demands combining long-term projection and the challenges of the short-term cycle with improved capability to develop rapidly innovative projects that respond to operational needs.
L’innovation est fondamentalement le résultat d’une compétition : économique, lorsqu’il faut devancer la concurrence ; médicale, lorsqu’il faut l’emporter sur la maladie ; militaire, lorsqu’il faut dominer l’adversaire. Loin d’être un phénomène inédit, comme pourrait le laisser croire l’engouement récent pour le mot, elle est donc aussi ancienne que la guerre elle-même. Elle se pratique parfois dans un esprit de conquête. Elle est dans d’autres cas le révélateur d’un sursaut collectif face à la menace. Toujours, elle réclame aux individus comme aux organisations l’effort d’imaginer et d’accueillir des instruments et des procédés nouveaux. Certaines périodes les y prédisposent, bousculant les certitudes, levant des barrières prétendument inamovibles, ouvrant des voies nouvelles. L’Armée de terre considère que nous vivons l’une de ces séquences historiques où danger rime avec opportunité.
Innover pour dominer : permanences et ruptures
L’Armée de terre vit en opération, au quotidien et pour longtemps, la réalité de la menace. Chacun mesure ainsi en unité comme en état-major, que l’innovation est une nécessité non seulement existentielle mais durable. À cette expérience vécue s’ajoute la mémoire historique d’innovateurs célèbres. Le colonel Estienne tient sans doute une place particulière parmi eux, offrant l’exemple étonnamment moderne d’une foi quasi-prophétique en la force d’une idée et de la rapidité avec laquelle elle a pris corps sur le champ de bataille (1).
Le besoin et l’Histoire sont donc des aiguillons qui prédisposent l’Armée de terre à la nouveauté. La réflexion tactique n’est d’ailleurs pas autre chose qu’une adaptation permanente aux contingences du combat et à des guerres qui se succèdent mais ne se ressemblent pas. Débouchant sur des organisations flexibles et des manœuvres audacieuses, autorisant la réorientation des systèmes d’armes parfois loin de leur destination initiale (2), cette inventivité tous azimuts est culturelle. Elle ne fixe pas de barrière a priori entre ce qui relève des structures, des méthodes ou des technologies. Elle constitue ainsi le large socle sur lequel l’Armée de terre construit une vision englobante de l’innovation – schématisée ci-après – recouvrant des finalités, des champs d’application et des temporalités plurielles. Chacune des quatre familles (3) retenues doit s’envisager à deux horizons : le plus éloigné, celui des changements de fond et des amplitudes générationnelles ; le plus proche, celui des boucles courtes, qui mérite que l’on s’y attarde.
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