La publication en février de la Nuclear Posture Review par le Pentagone ne traduit pas un réel bouleversement doctrinal par rapport à la politique de dissuasion de l’Administration Obama mais propose des inflexions en insistant davantage sur la centralité du nucléaire dans la stratégie américaine.
La Nuclear Posture Review vue d’Europe
The Nuclear Posture Review as Seen from Europe
The Nuclear Posture Review, published by the Pentagon last February, shows no real doctrinal change from the deterrence policy of the Obama administration but offers a number of reorientations in its greater emphasis on the central place of nuclear weapons in American strategy.
Le 2 février 2018, le Département américain de la Défense a rendu publique la Nuclear Posture Review (NPR), un document attendu depuis un an. Objet de nombreux fantasmes et craintes en raison des déclarations hasardeuses du Président américain en matière de dissuasion, cette nouvelle Posture porte davantage la marque de hauts responsables du Département de la Défense et de conseillers conservateurs qui ont depuis longtemps appelé à un durcissement de la politique de dissuasion américaine sans pour autant remettre en question ses fondements. Parmi ses principaux rédacteurs, on peut notamment citer Greg Weaver et Rob Soofer, actuellement en poste, mais aussi des conseillers non officiels tels que Franklin Miller et Keith Payne (1).
Tout en se montrant très critiques de l’Administration démocrate sortante, les auteurs revendiquent une grande continuité doctrinale et capacitaire. Il y a en effet peu de réelles innovations entre le contenu du document et la politique menée dans les dernières années de l’Administration Obama, tant en termes de description de l’environnement stratégique que de capacités requises. Néanmoins, en tant que document officiel présentant la politique nucléaire américaine, il adopte un angle différent en réaffirmant l’importance de la dissuasion dans la stratégie américaine et en ne cherchant plus à réduire le rôle et le nombre des armes nucléaires américaines.
Pour l’Europe, le texte a une résonance particulière. Tout d’abord, il témoigne d’une volonté manifeste de rassurer les alliés de l’Otan, ébranlés par certaines déclarations du Président. La description de la menace russe en particulier et le souhait d’afficher une grande fermeté par rapport à toute velléité d’agression devraient achever de convaincre les membres de l’Alliance atlantique que leurs inquiétudes sont bien partagées par Washington. Par ailleurs, certains systèmes d’armes nouveaux réclamés par la Review doivent jouer un rôle particulier en matière de dissuasion élargie. Pour autant, la proximité des analyses européennes et américaines sur la menace russe ne signifie pas que la NPR est une bonne nouvelle sous tous les angles pour l’Europe. En effet, le rôle très limité donné à la maîtrise des armements et le peu de soutien au régime du TNP risquent d’embarrasser les alliés européens dans les prochains forums multilatéraux consacrés à ces questions. Par ailleurs, la décision de revaloriser les armes nucléaires dans les stratégies de défense est loin de faire l’unanimité parmi les Européens.
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