Pékin s’inquiète de la montée du terrorisme islamiste et des menaces qu’il peut faire peser sur la province du Xinjiang. L’APL et la Police armée du Peuple ont ainsi accru leurs présences dans des zones sensibles, notamment à Djibouti et le long de la frontière avec l’Afghanistan.
Vers des Opex chinoises en matière de contre-terrorisme ?
Chinese Overseas Counter-Terrorism Operations?
Beijing is concerned by the increase in Islamic terrorism and the threat it could pose to the province of Xinjiang. The PLA and the police have increased their presence in sensitive areas such as Djibouti and along the border with Afghanistan.
Depuis le 11 septembre 2001, le discours diplomatique chinois sur le terrorisme islamiste dénonce sans relâche les « doubles standards » (l’absence de soutien clair de l’Occident à sa politique au Xinjiang) et la militarisation excessive de la réponse américaine, rappelant la nécessité de placer l’Organisation des Nations unies au centre de la réponse internationale, et l’importance de s’attaquer aux « racines » du mal – le retard de développement et l’injustice sociale. Pourtant en pratique, Pékin fait le choix d’une militarisation croissante de sa stratégie antiterroriste à l’international. Celle-ci prend la forme de coopérations bilatérales internationales de l’Armée populaire de libération (APL) et de la Police armée du peuple (PAP), de choix en matière d’équipement et d’une réflexion sur l’interventionnisme pour protéger les « intérêts à l’étranger » (haiwai liyi).
En 2015, la Chine a adopté sa première loi antiterroriste. Le texte prévoit que « les forces de l’APL et de la PAP peuvent envoyer du personnel en mission contre-terroriste en dehors des frontières, avec l’approbation de la Commission militaire centrale (CMC) » (article 71) (1). Cette formulation vague ouvre en théorie toutes les options, de la mission diplomatique d’information au déploiement d’unités dans des opérations multilatérales, voire à des frappes de drones ciblées. Mais s’il était franchi, le cap entre militarisation croissante et opérations extérieures ne constituerait rien moins qu’une rupture dans l’histoire de la politique étrangère de la République populaire. Cet article conclut pourtant que le scénario Opex chinoise est crédible – mais tout dépendra de la nature des crises que la Chine aura à gérer.
Le débat chinois sur l’interprétation de la loi sur le contre-terrorisme
La Chine invoquera-t-elle un jour l’article 71 de sa loi de 2015 ? À l’évidence, il s’agit plus de politique que de droit. L’article valide un changement qui a déjà eu lieu, la militarisation décrite ci-après. Surtout, il introduit un langage juridico-légal en vue de faciliter un changement d’approche dans un contexte de menaces croissantes sur les ressortissants chinois à l’étranger. En dix ans, une vingtaine d’attaques terroristes dans le monde ont causé une quarantaine de morts parmi les ressortissants chinois. En outre, un grand nombre de citoyens chinois résident dans des pays à risque. On en compte 3 000 au Mali, 65 000 au Nigeria, plus de 10 000 en Irak et au Pakistan. Près de 4 000 compagnies chinoises sont situées dans ce que les analystes chinois appellent « l’arc d’instabilité » et qui s’étend de l’Afghanistan et du Pakistan jusqu’au Sahel. De plus, en 2016, 122 millions de Chinois ont voyagé à l’étranger – on n’en comptait que 280 000 en 1982. Il est aujourd’hui fréquent qu’une attaque d’envergure dans une grande capitale fasse une victime chinoise. Ce fut le cas à Boston et à Nairobi en 2013, puis à Bruxelles en 2015. Par ailleurs, les tensions et les violences au Xinjiang attirent l’attention de certains groupes terroristes islamistes. Dans son premier discours en tant que prétendu Calife de l’organisation État islamique, Abu Bakr Al-Baghdadi a fait figurer la Chine dans sa liste des États où les « droits des musulmans sont bafoués », appelant les soldats du califat à « se venger ».
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