La coopération militaire entre la Belgique et la France est une réalité tangible mais complexe car dépendant souvent des enjeux de la scène politique intérieure belge. La recherche des équilibres impose des compromis permanents pas toujours favorables sur le plan de la défense. Le choix du successeur du F-16 risque d’en être l’illustration.
La coopération militaire belgo-française : oscillations politiques et identitaires
Franco-Belgian Military Cooperation: Political and Identity Difficulties
Military cooperation between Belgium and France, though real, is complex since it is frequently affected by internal Belgian politics. Compromise is permanently on the agenda when seeking a balance in the relationship and yet such compromise does not always favour defence matters. The choice of a successor to the F-16 looks set to be an example of this.
En Belgique, la France est vue comme un allié privilégié. Le Royaume fait partie des intérêts vitaux hexagonaux au sens politique et territorial, et par proximité géographique et culturelle. Malgré certains contentieux africains historiques, la France et la Belgique sont souvent complices concernant la politique de défense (vision d’ensemble, soutien à des dossiers spécifiques de la PESD/ PSDC, Groupe des Quatre, aspects Défense du Traité constitutionnel puis de Lisbonne, QG européen, GT1500, Initiative européenne d’intervention (1) sous l’impulsion du président de la République) ou lors des grands débats (coopération structurée permanente, Livre blanc européen, Stratégie européenne de sécurité, lutte contre le radicalisme (2)), même si les lignes de conduite ne sont pas toujours symétriques. Vu sa taille et ses intérêts stratégiques, la France a toujours été moins fédéraliste que la Belgique.
Du point de vue opérationnel, le faible poids capacitaire de la Belgique conduit à un accompagnement de la France à la carte, pour des opérations en coalition ou dans le cadre d’alliances. Cet appui dépend en fait de la composition idéologique et du degré d’équilibre linguistique des gouvernements belges incontournablement en coalition avec une vision différenciée du degré acceptable de prise de risque. Mais les accords bilatéraux de coopération militaire avec la France intègrent plus d’une centaine d’activités par an dont des entraînements navals, terrestres (3) et aériens (4) ou des actions communes possibles telles la récupération de ressortissants, le renseignement ou les forces spéciales. En outre, de nombreux stagiaires belges (5) suivent une formation et un entraînement au sein des unités et écoles françaises alors que des Belges contribuent à l’état-major du Corps de réaction rapide-France (Lille) et travaillent depuis longtemps à l’Eurocorps (6).
Cet accompagnement prudent varie selon les circonstances, les intérêts, la faisabilité, la cohérence, l’efficacité, la plus-value ou le degré de connivence-divergence des partis politiques inscrits dans les exécutifs belges (7). Si en France les morts pour la patrie sont assumés par le poids de la centralité hexagonale, d’un monopouvoir politique gouvernemental, du rôle de l’Élysée à la pointe de la « pyramide » et d’une culture stratégique historique assumée, il n’en est pas de même en Belgique traversée par des contingences politiques et communautaires où l’esprit de défense n’est pas assumé en profondeur (8). À Bruxelles, les conséquences de possibles drames à forte létalité seraient très certainement la chute du gouvernement !
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