Le principe des sanctions décidées par l’ONU s’applique à l’UE. Les mécanismes d’adoption sont complexes et passent par de subtiles négociations entre les membres permanents du Conseil de sécurité dont les intérêts divergent. Le retrait du Royaume-Uni de l’UE laissera la France en situation d’assumer une lourde responsabilité.
France et Royaume-Uni : adoption des sanctions onusiennes et européennes (Iran, Syrie, Russie) (1/2)
France and the United Kingdom: Adoption of UN and EU Sanctions (Iran, Syria & Russia)(1/2)
The principle of UN-mandated sanctions applies to the European Union. The mechanisms for their adoption are complex and subject to delicate negotiations between the Permanent Members of the UN Security Council, whose interests are somewhat divergent. The withdrawal of the United Kingdom from the European Union will leave France in a situation of heavy responsibility.
L’étude des sanctions de l’Union européenne (UE) révèle l’influence et le rôle joué par l’Organisation des Nations unies (ONU) dans la définition de la politique de sanctions de l’UE. Le Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU) peut être considéré comme une première instance de décision, en matière de sanctions, pour l’UE, dont les intérêts sont représentés par la France et le Royaume-Uni, deux États-membres siégeant de manière permanente, détenteurs d’un droit de veto et de l’arme nucléaire, de surcroît. Leurs décisions sont appuyées par deux membres non permanents relevant du groupe des États d’Europe occidentale et autres (GEOA), élus par l’Assemblée générale des Nations unies (UNGA) pour siéger aux côtés des Cinq permanents. Cette première étape tient compte des intérêts politiques, économiques et géostratégiques de la Russie et de la Chine et de coalitions d’États susceptibles de s’opposer aux intérêts de l’UE. En cas de blocage au CSNU, le Conseil de l’UE devient la seconde instance de décision. Il pallie l’absence de décision onusienne en adoptant des mesures complémentaires ou autonomes, ciblant un État d’une zone géographique placée sous influence d’un État permanent du CSNU. La marge de manœuvre politique que s’octroie l’UE vis-à-vis du CSNU, à l’encontre d’un État tiers, résulte des négociations interétatiques qui ont lieu au CSNU, lors de la proposition d’un projet de résolution, ainsi qu’au Conseil de l’UE au cours des négociations interétatiques.
Trois configurations peuvent être établies dans le cadre des négociations informelles des Cinq membres permanents (P5) qui précèdent l’adoption officielle de résolution instaurant des sanctions au CSNU, favorisant une potentielle prévision des résultats de vote. La première consiste en une logique de concertation maximale. L’entente des Cinq laisse présager un vote favorable de chacun d’entre eux au CSNU. La logique de protection des intérêts étatiques, par zone géographique, des Cinq ressort dans le deuxième cas de figure puisque le projet est « discut[é] dans [ses] grandes lignes » (1). La deuxième traduit ainsi la réticence de certains des Cinq à voter favorablement. L’abstention peut être envisagée par certains États du P5 lors du vote au CSNU. La troisième consiste en une logique de conflit entre les Cinq. Il y a absence de concertation entre eux. Si le texte n’est pas soumis à l’aval du P5, le risque du veto n’est pas exclu de la part de la Russie et de la Chine ou des trois États permanents occidentaux. Ces trois configurations établissent une grille de critères s’appliquant aux trois cas d’étude iranien, syrien et russe qui sont retenus.
Placés sur un continuum, ils représentent trois différents degrés d’autonomie des sanctions du Conseil de l’UE vis-à-vis de celles du CSNU. Le Conseil de l’UE observe la donne des relations internationales telle qu’elle émerge de l’activité du CSNU et s’érige en collège détenant son propre libre arbitre pour juger de ce qu’il est approprié de prendre comme décision pour faire respecter les valeurs de l’UE dans le concert des nations. Le degré du cas iranien est minimal puisqu’il consiste en des mesures complémentaires aux résolutions adoptées par le CSNU et en un petit nombre de sanctions autonomes de l’UE par rapport au CSNU. En revanche, le cas syrien se place au milieu du continuum puisqu’une tentative de projet de résolution a été soumise au vote au CSNU, avant de se voir mettre un double veto russe et chinois. À l’extrémité inverse du continuum, se trouve le cas de la Russie qui ne fait l’objet d’aucun projet de résolution au CSNU. Seule une résolution prise à l’UNGA sera votée, qui marque plus une incantation qu’une décision contraignante.
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