Alors que le concept stratégique Indo-Pacifique (IP) est vivement débattu, la relative absence de discussions sur la place des îles du Pacifique-océanien attire l’attention sur la nécessité de faire évoluer l’idée et ses politiques inférées. Depuis des années, économistes et stratèges envisagent la région Pacifique et l’organisation de l’espace, en particulier économique, du seul point de vue des États continentaux borduriers. Cette approche géoéconomique et systémique a rendu difficile la reconnaissance de la France dans sa « Pacificité », la renvoyant à un statut de puissance « extérieure ». L’adoption d’un nouveau langage diplomatique permet de réaborder la région de l’intérieur et du point de vue d’un État contributeur partageant les mêmes défis que ses voisins insulaires.

Nouvelle sémantique et géographie sont l’occasion de revisiter les changements géopolitiques advenus dans chaque sous-ensemble de l’IP, de prendre en compte l’évolution des Outre-mer, l’autonomie stratégique croissante des petits États insulaires, son impact sur la région et les intérêts français. Pour autant, la France n’a pas intégré une nouvelle communauté. À l’échelle régionale, l’IP la rapproche conceptuellement voire institutionnellement de l’Asie. Le concept met en lumière les relations particulières entre La Réunion et l’Inde ; la Nouvelle-Calédonie et l’Indonésie ou le Viêt Nam ; la Polynésie avec la Chine et le Japon. Plus globalement, il souligne combien les rapports coopératifs s’organisent dorénavant selon des relations interétatiques transversales et non plus selon une verticalité Nord-Sud.

De l’utilité d’un narratif Indo-Pacifique français

La France, comme les puissances grandes et moyennes, a besoin de narratifs pour affirmer son rang, montrer son adaptation au monde contemporain, exprimer ses proximités partenariales, dire qui elle est : à elle-même ; aux autres, aux puissances globales, aux États voisins et aux partenaires européens qui, pour la plupart, n’ont aucune idée de la géographie française et de ses frontières mondialisées, de l’Afrique australe au continent sud-américain.