L’action militaire est complexe, le droit est subtil et la démocratie est exigeante. Il est donc nécessaire d’établir un dialogue permanent plus rigoureux pour éviter de tomber dans des dysfonctionnements de perception et de procédures fragilisant l’efficacité des armées.
La dialectique du droit, de la démocratie et de l’action militaire
Differing Expectations of the Law, Democracy and Military Action
Military action is complex, the law finely nuanced and democracy demanding. We need therefore to develop a permanent and more rigorous dialogue that avoids being deceived by errors in perception and procedures that damage the effectiveness of the armed forces.
Avant 1789, l’ordre politique occidental, européen de manière générale, était gouverné par cette idée qu’au fond, la politique moderne n’existait évidemment pas dans la mesure où l’assentiment à l’ordre politique était un assentiment qui n’entraînait pas de dissociation de la nation avec elle-même. Vous aviez le roi ou vous aviez le gouvernement, vous aviez les lois fondamentales du royaume et finalement, la politique se résumait à une politique de cour ou de faction, sauf dans les périodes troublées comme la Fronde.
La Révolution française introduit cette idée radicalement nouvelle d’une rupture entre le passé et l’avenir, entre le camp du progrès et le camp de la conservation dans l’idée d’une construction politique toujours à venir et qui a sans cesse à régler avec elle-même la question et du passé, et de ses propres adversaires. Girardet montre très bien qu’elle aura une conséquence absolument gigantesque sur l’exercice de l’activité militaire. Bouthillon comme Girardet montrent magnifiquement que le paradoxe des sociétés nées de la Révolution française – et pratiquement toutes les sociétés occidentales sont nées sinon de la Révolution française au sens historique, du moins des principes philosophiques ayant présidé à la Révolution française – a donné lieu à une construction politique paradoxale.
Qu’est-ce que la construction politique paradoxale ? C’est que d’une certaine manière, nous affirmons la souveraineté de la nation comme successeur de la souveraineté royale, mais affirmant la souveraineté de la nation, nous créons un espace politique toujours à venir dans lequel la nation se trouve divisée contre elle-même de manière permanente entre la gauche et la droite, entre le camp du progrès et le camp de l’avenir, etc. Ce qui fait que la difficulté de l’exercice démocratique et d’ailleurs la difficulté de l’exercice de la démocratie représentative – en particulier ce qu’on voit bien en France ces jours-ci – est une difficulté consistant à penser à la fois la nation comme une et la nation comme intrinsèquement divisée.
Il reste 88 % de l'article à lire
Plan de l'article