La pandémie du Covid-19 oblige à la mobilisation. L’État s’y est employé avec les acteurs du pays, malgré des difficultés dont il faudra tirer les leçons. L’Europe a eu du mal à se mettre en ordre de marche et à s’imposer dans un espace géopolitique en recomposition. Un sursaut de l’Union européenne (UE) est indispensable pour ne pas être marginalisée.
Covid-19 : une crise majeure et globale, trente ans après la chute du Mur
Covid-19: a Major Global Crisis, Thirty Years after the Fall of the Wall
The Covid-19 pandemic demands mobilisation. The state has seen to it, bringing together the many players across the country despite some difficulties, from which we will need to draw lessons. More generally though, Europe has found it difficult to get into marching order and to impose itself in the developing geopolitical area. The European Union desperately needs a thorough shake-up if it is not to be marginalised.
« Nous sommes en guerre » : le président de la République, Emmanuel Macron, a ainsi qualifié le combat contre le coronavirus. Si l’emploi du mot « guerre », même précisé comme « guerre sanitaire », est sujet à débat (1), il renvoie du moins à trois idées : l’épreuve majeure vécue par la nation induit une mobilisation digne d’un effort de guerre ; elle interroge le futur de l’UE ; elle est de nature à générer une autre configuration géopolitique du monde.
L’épreuve majeure que vit la nation induit une mobilisation digne d’un effort de guerre
L’État est au cœur de la gestion de crise. Sans porter à ce stade de jugement sur la rapidité, contestée, de décisions relatives aux commandes de masques, de tests, de respirateurs, on observe que le gouvernement s’est mis en capacité, en s’inspirant d’une économie de guerre, d’organiser les entreprises pour la production ou la recherche de ce qui est indispensable face à l’épidémie. Sans limiter a priori la dépense budgétaire, il a décidé de soutenir les entreprises en difficulté et, pour préserver l’emploi et les ressources des travailleurs, à indemniser le travail à temps partiel. Il a restreint sévèrement la liberté d’aller et de venir, et a interdit les rassemblements. Il a organisé le rapatriement des Français depuis l’étranger. Il a invité les hôpitaux à renforcer leurs moyens et à développer les liens avec l’hospitalisation privée. Il a mis en mouvement l’armée, pour édifier un hôpital à Mulhouse, dépêcher des porte-hélicoptères médicalisés outre-mer, transférer des malades vers des zones moins touchées, en complétant les moyens d’évacuation civils, comme les trains médicalisés de la SNCF (2). Les armées font aussi du transport de fret et sécurisent des lieux sensibles de production et de stockage. Les préfets, les directeurs des agences régionales de santé, les officiers généraux des zones de défense et de sécurité coordonnent ces mesures sur le territoire. Les collectivités locales (régions, départements, communes), les entreprises, les travailleurs indispensables à la vie de la société s’inscrivent, souvent avec imagination, dans cet effort global de la nation.
La mobilisation de moyens, outre celle des esprits, est très supérieure à celle de la « guerre » contre le terrorisme. Il faut raison garder dans les comparaisons et penser que la crise actuelle sera loin de solliciter autant de morts que la Seconde Guerre mondiale – encore que des hypothèses extrêmes ont évoqué, faute de mesures suffisantes, jusqu’à 300 000 décès, alors que cette guerre a causé 350 000 victimes civiles en France – ou un effort similaire de la nation. Il faut néanmoins voir que la métropole, même au plus fort des crises coloniales, n’a pas connu depuis une telle mobilisation de la société ni une telle menace sur son économie. Trente ans après la chute du Mur, la France vit une épreuve majeure et globale, là où on ne l’attendait pas.
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