Un des problèmes les plus épineux que pose la politique militaire de la France est celui de concilier sa doctrine de dissuasion, reposant sur une force nucléaire stratégique autonome, avec l'emploi éventuel de son corps de bataille aéroterrestre dans une opération qui pourrait ne pas être liée directement à la dissuasion nationale. Comme a dit le président de la République, François Mitterrand, dans sa conférence de presse du 24 septembre : « … Vous savez qu'il y a une sorte d'incompatibilité entre la stratégie qui consisterait à organiser la bataille de l'avant et à faire jouer ensemble nos forces nucléaires pour un autre objectif que la défense sacrée de notre territoire, ce qui n'interdit aucunement à la France de remplir ses obligations au regard de son allié ».
L'auteur, Américain spécialiste des problèmes de défense et qui connaît bien notre pays, cherche ici à voir si une telle bataille est totalement impensable. Si la dissuasion américaine venait à manquer, la dissuasion française ne jouant que pour notre propre territoire, on peut se demander si une bataille, dont le Pacte de Varsovie serait l'initiateur et le territoire de nos alliés le théâtre, pourrait être totalement impossible. Si elle survenait, la France serait-elle une simple spectatrice ? Comme t'a dit M. Pierre Mauroy, Premier ministre, le 14 septembre à l'IHEDN : « L'agression contre la France ne commence pas lorsqu'un ennemi pénètre sur le territoire national ».
En pratique, le terme « bataille de l'avant » est ambigu, et on le constatera en lisant cet exposé. Il y a la « stratégie de l'avant » qui se passe, pour l'Otan, au plus près du rideau de fer, à laquelle la France ne peut participer parce qu'elle entraînerait un engagement automatique. Il y a une bataille qui, pour les Français, serait en avant de leurs frontières, et qui est toute autre chose. Le principal intérêt de cet article est cependant l'effort de compréhension montré par un Américain vis-à-vis de la position française.