Editorial
Éditorial
Janvier 2020, des rumeurs commencent à circuler sur un coronavirus agressif dans une province de la Chine. Très vite, la rumeur se transforme en une pandémie brutale mettant à l’arrêt la quasi-totalité de la planète. Très vite, rien que dans notre pays, nous découvrons avec stupéfaction que nous manquons de masques dont la quasi-totalité de la production est assurée en Chine, que le paracétamol est fabriqué en Inde et que nous sommes devenus dépendants dans le cadre d’une mondialisation économique poussée à l’extrême. Très vite, les notions d’indépendance et de souveraineté sont redevenues d’actualité. N’avions-nous pas bradé celles-ci au profit d’un modèle économique d’interdépendance devenue excessive ? Et au-delà des aspects commerciaux ou financiers, un véritable débat s’est engagé.
Plus récemment, l’alliance AUKUS – au détriment de la France et de l’Europe – a rappelé que la géopolitique et les rapports entre les Nations étaient des monstres froids, où la brutalité pouvait l’emporter. Paradoxalement, la perception de ces questions n’est pas la même, en particulier en Europe. Certains de nos partenaires se satisfont depuis longtemps de liens de dépendance, voire de subordination, espérant bénéficier d’une garantie de sécurité. À l’inverse, la France, depuis le général de Gaulle, s’est efforcée de préserver cette autonomie d’appréciation et de choix – bénéficiant des efforts conséquents faits pour la dissuasion nucléaire – en maintenant une défense crédible s’appuyant sur une BITD forte, sans pour autant renoncer à construire des coopérations nécessaires et fructueuses à l’échelle européenne.
Ainsi, le dossier de ce mois propose quelques approches éclairant cet enjeu majeur et structurant, tant sur le plan politique, qu’économique et militaire. D’autant plus que l’environnement géopolitique actuel s’est durci avec les confrontations entre la Chine et les États-Unis, entre la Russie, l’Otan et l’Union européenne – bien marginalisée, car loin de comprendre ce que signifie la puissance – ou encore avec l’Iran et l’accès à l’arme atomique. Or, assumer sa souveraineté exige des choix et des efforts inscrits dans la durée, des actions difficiles dans un contexte où les opinions publiques sont versatiles.
Il en est de même de l’opération Barkhane avec une vision non française qui souligne combien l’engagement de nos forces depuis 2013 a été utile, même si, là aussi, les difficultés sont nombreuses, d’autant plus que la manipulation médiatique est à l’œuvre, en particulier par la Russie, avec le déploiement de groupes paramilitaires dont la priorité n’est pas la reconstruction d’États sûrs et démocratiques.
À l’heure où la France entre en campagne pour déterminer son futur politique, il est indispensable de comprendre que nos intérêts et nos choix dépendent également de l’extérieur et que dans un monde de plus en plus incertain, la défense reste une responsabilité majeure et non une variable d’ajustement. L’oublier, c’est subir l’histoire, mais aussi accepter la soumission et le renoncement à ce qui constitue la force de notre Nation.
C’est le rôle du soldat que d’assumer cette défense, c’est le rôle du politique que de construire cette défense. ♦