L’alliance militaire entre la Corée du Sud et les États-Unis s’est accrue ces dernières années, après des périodes de doutes et de remises en question. Aujourd’hui, la relation est forte due à un rapprochement probable avec le Quad. Pour Washington, Séoul est un allié modèle et fiable.
L’alliance militaire entre la Corée du Sud et les États-Unis sous Moon Jae-in, 2017-2022
The Military Alliance Between South Korea and the United States under Moon Jae-in, 2017-2022
The military alliance between South Korea and the United States has strengthened in recent years following periods of doubt and questioning. The relationship is strong today, aided by a probable rapprochement with the Quad. For Washington, Seoul is a model and reliable ally.
L’alliance militaire entre la Corée du Sud et les États-Unis, forgée dans la guerre de Corée, est formalisée depuis le 1er octobre 1953 par un traité de défense mutuelle toujours utile pour Séoul face à la menace nord-coréenne. Les deux pays se sont rapprochés au fil du temps. Les relations économiques se sont développées, en particulier après la mise en œuvre du premier accord de libre-échange entre les deux pays en 2012. Depuis, les investissements sud-coréens aux États-Unis ont presque triplé, pour atteindre plus de 55 milliards de dollars, et les investissements américains en Corée du Sud se sont accrus de près de 50 %, se montant à plus de 40 milliards de dollars (1). Cela ne veut pas dire que les relations n’ont jamais été tendues. Washington et Séoul ont par exemple souvent divergé sur la meilleure façon de traiter diplomatiquement avec la Corée du Nord. Pourtant, les États-Unis considèrent aujourd’hui la république de Corée comme un allié modèle et l’alliance militaire entre les deux pays est l’une des plus fortes au monde. Tandis que la fin du mandat de Moon Jae-in clôt une séquence de cinq ans du côté de Séoul, se présente l’occasion de revenir sur l’un des piliers de la stratégie de défense sud-coréenne.
Garanties de sécurité
Alors que la Corée du Sud a connu des vagues d’antiaméricanisme au début des années 1980, en 2002 et en 2008, l’alliance avec les États-Unis est aujourd’hui très populaire. En septembre 2021, 78 % des Sud-Coréens se disaient favorables à son maintien ou à son renforcement (2). Le soutien est également patent aux États-Unis : 63 % des Américains soutiendraient l’emploi de leurs forces armées pour défendre la Corée du Sud en cas d’attaque du Nord (3).
Les garanties de sécurité positives dont bénéficie Séoul, incluant le « parapluie nucléaire », sont régulièrement réaffirmées. Cependant, et cela est intrinsèque à toute posture de dissuasion élargie, le fait que Washington soit prêt à risquer sa propre sécurité pour défendre celle de la Corée du Sud ne va pas de soi. D’autant plus que Pyongyang détiendrait désormais une capacité de frappe nucléaire sur le territoire américain. Le Hwasong-12, un IRBM (Intermediate Range Ballistic Missile) testé à nouveau en janvier 2021, a la capacité de toucher Guam et, peut-être, l’Alaska. Le Hwasong-15, un ICBM (Intercontinental Ballistic Missile) testé en 2017 et 2022, pourrait, lui, atteindre les États-Unis continentaux et disposerait d’une charge utile suffisante pour porter des leurres ou d’autres contre-mesures (4). Certes, cette capacité nucléaire nord-coréenne a une crédibilité opérationnelle pour l’instant limitée, en particulier parce que l’aptitude de Pyongyang à lancer une seconde frappe se heurte à la possibilité d’une neutralisation préemptive américaine. Cependant, cela pourrait évoluer si la Corée du Nord détenait des ICBM à propulsion solide sur des lanceurs mobiles, ou déployait des têtes multiples sur ses vecteurs intercontinentaux, ou d’autres moyens permettant d’en garantir la pénétration face aux défenses antimissiles (planeurs hypersoniques, têtes manœuvrantes). Des progrès dans ces secteurs entraîneraient des arbitrages complexes pour Washington dans le cadre d’un scénario d’escalade, pouvant potentiellement aller jusqu’à un découplage stratégique entre les deux alliés. Finalement, l’arrivée des premières capacités opérationnelles intercontinentales pose des questions anciennes (sacrifier une ville à soi pour celle d’un autre pays, ici, par exemple, Los Angeles pour Séoul) sous un angle nouveau. Cependant, avec 28 500 soldats américains et leurs familles sur la péninsule, Washington serait forcément impliquée, ce que Pyongyang ne peut ignorer.
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