L’espace est redevenu un champ de compétition, non seulement entre les États comme dans les années 1960, mais avec de nouveaux compétiteurs dont l’industrie privée avec le « New Space » lié à Internet. Les ambitions sont affichées et les investissements de plus en plus importants tant la concurrence est forte.
Nouvelles formes de compétition dans l’espace
New Types of Competition in Space
Space has once again become a competitive field, not only between countries, as in the 1960s, but also with new competitors, including private industry, via New Space and its access through internet. Ambitions are clearly stated and, given the strong competition, we see ever-greater investment.
Les années récentes ont vu l’activité spatiale s’accroître d’une manière inédite. Entre 2015 et 2021, le nombre des lancements spatiaux a connu une augmentation de plus de 60 % (de 87 lancements par an à un total de 146 en 2021) tandis que le nombre d’objets mis sur orbite a, lui, été multiplié par 9 (de 236 satellites en 2015 à 1 827 en 2021). Pendant cette période, l’intensité de l’activité spatiale a même littéralement crû d’un ordre de grandeur, avec plus de satellites lancés pendant le seul mois de mai 2021 que pendant toute l’année 2016 par exemple.
L’espace ne fait l’objet de cette activité soutenue, industrielle et militaire, que depuis très peu de temps. Pendant longtemps, la difficulté à accéder aux orbites a empêché le développement d’une véritable utilisation de l’espace à grande échelle. Encore aujourd’hui, l’environnement spatial demeure éminemment hostile et contraignant, loin d’autoriser cette utilisation intensive que connaissent les milieux terrestre, aérien ou maritime. Pour autant, les transformations récentes des technologies et des usages qui leur sont associés font entrevoir des évolutions profondes. Plusieurs agences spatiales envisagent désormais « d’habiter » l’espace de façon plus durable pour y déployer une activité humaine à plus long terme. Ces perspectives modifient la façon dont les États se projettent eux-mêmes dans ce milieu en tentant de mieux se « l’approprier », au moins au plan politique (1). Car si l’émergence de nouveaux acteurs privés est l’une des caractéristiques premières de ces transformations, elle n’a pas fait disparaître le rôle moteur des États dans cette approche nouvelle du milieu spatial. De nouveaux projets militaires en particulier font de l’espace le lieu de nouvelles confrontations possibles, accentuant encore cette impression d’un changement de nature profond alors que l’espace devient un champ à part entière des relations internationales du XXIe siècle.
Une transformation progressive
Historiquement, le caractère très contraignant de l’activité spatiale s’est d’abord traduit par une grande inégalité entre les nations. Dans les années 1950- 1960, seul un club très restreint de pays technologiquement avancés, financièrement puissants et politiquement influents a pu commencer à investir ce milieu. En réalité, les États-Unis et l’Union soviétique ont été les premières véritables puissances spatiales. Pour elles, l’espace est alors très rapidement devenu le lieu d’une véritable confrontation stratégique. Il est même né de leur face-à-face stratégique pourrait-on dire. Dès ces premières années, deux nouvelles technologies militaires clés ont alimenté cette confrontation : l’invention du missile balistique à longue portée (portée par les V-2 allemands), et celle de l’arme atomique qui a marqué la fin de la Seconde Guerre mondiale et qui structurera la guerre froide.
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