L’histoire permet de faire des comparaisons et de comprendre les bouleversements géopolitiques. La seconde guerre sino-japonaise enclenchée en 1937 à Tokyo s’enlise rapidement faute de buts de guerre précis. Le mépris japonais à l’égard des Chinois a conduit à des massacres injustifiés. Des leçons oubliées par Moscou en 2022.
La guerre en Ukraine à la lumière de la seconde guerre sino-japonaise
The War in Ukraine in the Light of the Second Sino-Japanese War
History allows us to make comparisons and to understand geopolitical disruption. The Second Sino-Japanese War, started in 1937 by Tokyo, soon became bogged down through lack of precise war aims. Japanese contempt for the Chinese led to unjustified massacres. Such lessons have been forgotten by Moscow in 2022.
Le 2 mai 2022, Philippe Pons, correspondant au Japon du Monde, a relaté la parution d’un article du magazine Zoom Japon qui comparait la guerre en Ukraine à l’incident de Mandchourie de 1931 (1). L’invasion par le Japon de la Chine est éclairante à plus d’un titre pour comprendre la guerre russo-ukrainienne qui, elle aussi, n’a pas été déclarée et voit deux peuples proches – culturellement et historiquement – s’affronter de manière inexpugnable.
Cet article abordera trois questions : la première sera consacrée à une comparaison de la place tenue par la Chine au Japon et par l’Ukraine en Russie au cours de l’histoire et les évolutions contemporaines, la deuxième portera sur les particularités des deux invasions, et la troisième aura trait aux crimes de guerre et à la justice internationale.
Culture, géographie et politique
La guerre russo-ukrainienne a des racines profondes. La Russie doit une grande partie de son identité culturelle à la Rus’de Kiev, dont elle se réclame en permanence. Vladimir Poutine justifie d’ailleurs son opposition à l’indépendance de l’Ukraine par l’origine commune des deux peuples, ravalant l’identité culturelle ukrainienne à un simple folklore. Il se situe ainsi dans le droit fil de l’Empire russe qui qualifiait l’Ukraine de « Petite Russie » et avait interdit les publications en langue ukrainienne à la fin du XIXe siècle. La répression par le régime bolchevique du mouvement nationaliste ukrainien, la famine orchestrée par Staline (Holodomor) à l’encontre de la paysannerie ukrainienne et l’invasion actuelle sont considérées par Moscou comme des politiques légitimes visant à ramener un peuple-frère dans le giron de la maison commune russe.
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