Il existe des continuités dans la politique russe – des tsars à Poutine, en passant par l’URSS – avec une vision impériale, voire impérialiste sur un espace géographique. Mais trop souvent, cette politique a été conduite en transformant et en manipulant la réalité, au risque d’échecs majeurs.
Histoire militaire - Les invariants de la politique russe
Military History—The Invariables of Russian Politics
From the Czars, via the USSR, to Putin, there have been lines of continuity in Russian politics including an imperial, even imperialist, vision of a geographical space. Too often, alas, this policy has been carried out by altering and manipulating reality at the risk of major failure.
La politique constamment poursuivie par la Russie a consisté, d’abord à atteindre les mers depuis Moscou, puis à s’assurer des débouchés vers les mers libres de glace durant toute l’année. Cela s’est traduit par une expansion vers le nord, le sud et l’est, selon quatre axes : Finlande, mer Noire, Asie centrale et Extrême-Orient. L’histoire russe s’apparente à celle d’une colonisation continue. Cette permanence impériale de la politique russe s’accompagne d’une perception particulière de son environnement géopolitique, le complexe obsidional de « forteresse assiégée ».
L’impérialisme russe
Le « messianisme russe », grâce auquel un empire va se développer progressivement depuis la petite principauté moscovite, voit le jour après la victoire d’Alexandre Nevski sur les Teutoniques en 1242. Mais c’est seulement sous le règne d’Ivan le Terrible, sacré tsar (1) en 1547 que l’État russe débouche sur la mer Caspienne et entre pour la première fois en contact avec la puissance ottomane. Mais, c’est avec Pierre le Grand, à compter de 1682, que la Russie se trouve réellement dans le système des puissances : les premiers ports sont conquis sur la Baltique, la Russie prend pied dans les régions baltes, en Poméranie et en Finlande. Surtout, par la victoire de Poltava, remportée sur les Suédois en 1709, ceux-ci sont contraints à quitter l’Europe continentale et la Russie s’installe dans la place de grande puissance du nord européen, place qu’elle ne quittera jamais plus. Pierre crée alors Saint-Pétersbourg, comme un défi aux Suédois, après s’être fait sacrer « tsar de toutes les Russies ». En Asie, la Russie s’étend jusqu’au Pacifique, colonise la Sibérie et, vers le sud, annexe les côtes occidentales et méridionales de la Caspienne.
Catherine II va poursuivre le même programme impérialiste : elle démembre la Pologne et s’attaque à la Turquie, annexe l’Ukraine orientale et centrale (2), et se fait reconnaître « protectrice des chrétiens orthodoxes de l’Empire ottoman ». Ayant obtenu un droit de libre navigation en mer Noire, elle crée le port d’Odessa. En 1809, la Finlande est placée sous tutelle. Lors du congrès de Vienne en 1815, Alexandre Ier ne se rallie pas à l’idée d’équilibre des puissances européennes, cher à Metternich, et confirme sa mainmise sur la Pologne. En revanche, il se montre un ferme partisan de la Sainte-Alliance pour s’opposer à l’éclosion des idées libérales. À partir de la guerre d’Indépendance de la Grèce (1823), la Russie se fait le champion de l’émancipation des pays balkaniques contre le joug ottoman. En réalité, la Russie cherche à s’assurer un accès en Méditerranée, par le contrôle des Dardanelles, les détroits turcs, projet auquel l’Angleterre se montre absolument opposée. La Russie subit un revers grave en 1856, à l’issue de la guerre de Crimée, lorsqu’au Traité de Paris, l’accès aux détroits lui est fermé. L’Angleterre triomphe.
Il reste 85 % de l'article à lire
Plan de l'article