Économie de guerre, économie dirigée, une approche économique différente de l’économie globalisée libérale et mondialisée que nous connaissons. Passer à une économie de guerre nécessite de profondes et rapides mutations sous le contrôle étroit de l’État, afin de répondre à des besoins opérationnels conséquents.
Vous avez bien dit « économie de guerre » ?
Did You Say “War Economy”?
A war economy implies a state-controlled economy: an economic approach different from the liberal and globalised economy that we are used to. To move to a war economy requires rapid and fundamental changes under strict state control in order to respond to major operational requirements.
À l’ère du libéralisme triomphant et d’une économie globalisée bien établie dans les mœurs, la notion d’économie de guerre évoquée par le président de la République au mois de juin 2022 relève de l’oxymore. Car l’économie de guerre est avant tout une économie dirigée dans un contexte avéré de confrontation. Elle contribue des mesures exceptionnelles de prévention en regard de l’émergence de contraintes exogènes qui, si elles ne sont pas contrées par une réponse appropriée, menacent à brève échéance l’équilibre sécuritaire du pays, partant la pérennité de ses institutions et l’intégrité nationale. La dialectique aporétique actuelle d’une gradation concurrence/contestation/confrontation sur laquelle alerte le CEMA Thierry Burkhard au vu de l’évolution récente de la situation internationale, rend toute sa signification à la maxime latine : si vis pacem, para bellum.
Dans le contexte actuel, la mise en œuvre d’une économie de guerre relève plus d’une nécessaire démarche systémique nouvelle à l’échelle de la base industrielle et technologique de défense (BITD) dans son ensemble que d’ajustements ponctuels tels que ceux auxquels on a pu procéder lors de la dernière décennie au titre du référentiel industriel de la défense qui gravite autour de la conduite des opérations d’armement et que formalisent notamment les instructions ministérielles (IM) 100 et 1618. Outre l’objectif de simplifier les processus avec, de façon sous-jacente déjà, la volonté d’une plus grande réactivité, ces évolutions répondaient plutôt à des contraintes endogènes d’ordre économique et plus particulièrement d’un principe de rationalisation budgétaire, lorsque les crises internationales récentes et leur accélération procèdent désormais d’une anabase dans l’érosion des équilibres globaux et appellent des mesures plus à la hauteur des nouveaux enjeux.
À deux reprises la France a mis en place une véritable économie de guerre. En 1793, sous la férule de Lazare Carnot, membre du Comité de salut public et exceptionnel organisateur de la défense, efficacement secondé en cela pour les questions de l’armement par Prieur de la Côte-d’Or, et de 1915 à 1918, sous celle d’Albert Thomas, tout aussi exceptionnel ministre de l’Armement et des fabrications de guerre. Hormis quelques ébauches, l’économie de guerre n’a pas eu le temps de s’organiser lors des invasions de 1870 et de 1940, nonobstant l’effort budgétaire consenti à partir de 1936, et s’est traduite par des acquisitions d’urgence à l’étranger, faisant fi de tout souci de soutenabilité dans la durée de ces matériels expédients.
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