Le réchauffement climatique n’est pas qu’une affaire de spécialistes. Bien au contraire, ses impacts auront des conséquences géostratégiques. La question de l’eau et des ressources alimentaires, la diversité biologique, les atteintes à l’environnement, autant d’enjeux remettant en cause les fragiles équilibres géopolitiques obligeant les États à se positionner pour le bien commun de l’humanité.
Réchauffement climatique et enjeux géostratégiques
Global Warming and Strategic Challenges
Global warming is not just the business of specialists. Quite the contrary: its impact will have geostrategic consequences. The issues of water and food supply, biological diversity and damage to the environment are all challenges which highlight the fragile geopolitical balances now obliging countries to take a stance for the common good of humanity.
Le réchauffement climatique intervient dans un contexte où les enjeux géostratégiques sont en forte mutation : asiatisation du monde, conflit larvé Chine–États-Unis dans tous les domaines (économique, commercial, financier, montée en puissance du Soft Power), transformation des armes avec l’entrée en jeu des drones au coût sans aucune commune mesure avec les armements lourds et capables de causer des dommages considérables, affaiblissement de l’Europe incapable de parler d’une seule voix, transformation de l’Afrique à la fois du fait du retrait des anciennes puissances coloniales, de la présence croissante de la Chine et de la Russie, et des poussées islamistes qui trouvent des terrains féconds en raison de la très grande diversité des ethnies qui se plient assez mal aux frontières telles qu’elles ont été délimitées au siècle dernier.
Dans ce paysage très instable et très troublé, le réchauffement climatique vient apporter dans un premier temps, des changements, à terme de véritables bouleversements, sur terre comme sur mer. L’effet du dérèglement climatique se fait déjà sentir alors même que l’augmentation de la température n’est que de l’ordre de 1,1 °C à l’échelle de la planète. Cependant, ce chiffre dissimule de très grandes variations entre la terre et la mer (la mer se réchauffant moins vite, même si on note une accélération au cours des toutes dernières années) et sur terre. Ainsi, le réchauffement en Arctique est de l’ordre de 4 °C, en France de l’ordre de 1,8 °C, peut-être davantage. Certaines zones sont devenues totalement inhabitables en raison d’une température de plus de 50 °C et d’une très grande humidité rendant la vie humaine impossible. Les scientifiques considèrent en effet que l’indice dit du « bulbe humide » le plus élevé qu’un humain puisse supporter est de 35 °C pendant six heures. Ainsi, d’ores et déjà, deux zones l’une au Pakistan, l’autre dans le golfe Persique sont devenues impropres à la vie humaine. L’Administration nationale [américaine] de l’aéronautique et de l’Espace (NASA) estime que le risque est grand d’ici 2050 que l’Iran, Oman, Koweït, les pays bordant la mer Rouge (Égypte, Arabie saoudite, Soudan, Éthiopie, Somalie et Yémen), l’Est de la Chine, certaines parties d’Asie du Sud-Est et le Brésil dépassent cet indice, rendant la vie très difficile. Il pourrait en aller de même dans certains États américains du Midwest : l’Arkansas, le Missouri et l’Iowa. Cette situation ne peut évidemment que conduire tout d’abord à des conséquences vitales et sanitaires dramatiques, puis à de très fortes migrations.
Il faut y ajouter les territoires soumis à la submersion qui risquent de disparaître. C’est immanquablement le cas des petites îles du Pacifique, dans des temps relativement proches, tout comme, de manière massive, les littoraux du Bangladesh, des Pays-Bas, d’une partie de la Floride ou la ville de Canton en Chine. La question est d’autant plus préoccupante que 60 % de la population du monde vit à moins de 100 km des côtes – 50 % en France. L’érosion de la côte atlantique est une réalité qui impose de réfléchir au déplacement des populations vers l’intérieur. Et en réalité, la réduction du territoire national, en métropole et en outre-mer, constitue un nouveau problème de sécurité nationale dont le ministère des Armées s’est emparé depuis quelques années.
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