Le Sahel connaît depuis des années une instabilité chronique, notamment avec un terrorisme islamiste déstabilisateur. La mauvaise gouvernance, la corruption et l’insécurité mettent à mal le développement économique, créant de ce fait des flux migratoires vers le nord et l’Europe. Dès lors, la démocratie comme mode politique est fragilisée et remise en cause par les Africains eux-mêmes.
Gouvernance et terrorisme au Sahel : quelle(s) perspective(s) ?
Governance and Terrorism in the Sahel: the Future?
The Sahel has suffered chronic instability for many years, the result in particular of destabilising Islamist terrorism. Poor governance, corruption and insecurity have adversely affected economic development, which has generated flows of migrants to the north and to Europe. Democracy as a political structure has been undermined and is now called into question by the Africans themselves.
L’instabilité au Sahel est régulièrement présentée comme la conséquence du terrorisme et l’incapacité des États de cette zone à assurer leurs missions régaliennes sur l’ensemble de leur territoire pour faire face à ce type de menace. Il ne fait aucun doute que la persistance de la crise sahélienne qui débute en 2012 par le Mali avant de s’étendre au reste des pays voisins, est d’abord une crise de légitimité du pouvoir étatique. Cette délégitimité renvoie bien sûr aux problèmes institutionnels et structuraux de l’État, mais également à ceux concernant les pratiques et les comportements de ses agents et à la question du « contrat social » à avoir ou non entre l’État et ses citoyens. Tous les efforts engagés par l’Occident pour y assurer à grand prix la paix et la reconstruction ont été mis en échec. Le Sahel continue de faire face aux groupes armés islamistes radicaux, aux rébellions indépendantistes et politico-militaires, aux groupes criminels en tout genre, à la mal gouvernance à l’échelle locale et nationale, aux désillusions sécuritaires et démocratiques et au retour des coups d’État.
Or, en l’absence de mécanismes de médiation et d’institutions modernes fiables et démocratiques, les États sahéliens risquent de devenir des États « en échec » ou « en faillite », avec de terribles conséquences sur le bien-être des populations et le développement socio-économique de ces États. Aussi, pour remédier aux déséquilibres de pouvoir et aux inégalités qui alimentent les conflits dans cette région, il faut renforcer les piliers de la bonne gouvernance afin de promouvoir une paix durable et l’État de droit où la gestion politique, économique et sociale est transparente et équitable. Dans ces conditions, l’État et le gouvernement deviendront légitimes aux yeux des citoyens qui pourront leur faire confiance. On parlera alors de victoire sur les crises et les conflits multidimensionnels qui déchirent le Sahel. Il ne s’agit surtout pas de persister à trouver des solutions dans le modèle westphalien de l’État occidental qui a échoué en Afrique mais de s’émanciper d’un grand nombre de paradigmes inopérants depuis des décennies.
Est-ce possible d’établir un lien entre recul démocratique et explosion du terrorisme au Sahel ?
Un État faible est forcément livré à des forces anarchiques. Mais existe-t-il une compatibilité entre terrorisme et démocratie ? Je ne le crois pas et l’antinomie de ces deux concepts est rapidement démontrée. Le recours à l’instrument terroriste par un groupe démontre son incapacité à porter sa revendication sur le plan politique grâce aux outils de la démocratie. Le terrorisme est, lui, par définition, antidémocratique, puisqu’il lutte contre ce système qu’il considère comme illégitime. Ce qui est en jeu, fondamentalement, c’est la culture démocratique avec ses règles, ses valeurs et son esprit. La démocratie est la cible du terrorisme car, elle incarne le contraire de ce qu’il est : la liberté, la tolérance, le respect, la culture, l’égalité entre les femmes et les hommes. Ces principes lui sont insupportables. Les terroristes ont l’illusion de croire que la démocratie est faible et qu’ils peuvent l’ébranler en l’effrayant, la diviser en l’épouvantant, la faire douter en radicalisant une infime partie de la population.
Il reste 81 % de l'article à lire
Plan de l'article