La Marine nationale est pleinement engagée sur un spectre très large de missions, allant de l’Action de l’État en mer (AEM) jusqu’à la haute intensité. Cette dualité permanente est une caractéristique majeure de notre politique maritime, d’autant plus que la France dispose de la deuxième Zone économique exclusive (ZEE) mondiale, l’obligeant à en assumer la sûreté.
La Marine nationale et l’Action de l’État en mer à l’épreuve de la haute intensité
The French Navy and State Action at Sea: Facing the Challenge of High Intensity
The French Navy (la Marine nationale) is fully committed to a very wide range of missions, from non-defence maritime operations (or state action at sea—SAS) to high-intensity military activity. This double role is a major characteristic of our maritime policy, in particular because France has the second largest exclusive economic zone (EEZ) in the world and has therefore to ensure its security.
La fonction de préfet maritime – imaginée sous le Consulat, un temps supprimé au début de la Restauration et rétablie en 1827 –, va traverser le siècle et au-delà, ses compétences étant confirmées sous Louis-Philippe en 1844, puis encadrées plus étroitement sous la troisième République avec une nouvelle autonomie donnée à l’Inscription maritime en 1902 et, en 1930, avec la perte de compétence sur les pêches maritimes.
La négociation d’une nouvelle convention sur le droit de la mer, dans laquelle la France est très active, aboutira en décembre 1982 sur un texte, socle aujourd’hui incontesté du droit positif de la mer, entré en vigueur en 1994. La Convention de Montego Bay détermine les nouvelles règles des rapports inter-nationaux entre les États en mer et donne notamment à l’État côtier des droits souverains sur les ressources se situant dans de vastes espaces marins, les Zones économiques exclusives (ZEE) et d’importants pouvoirs de juridiction, notamment en matière de protection du milieu marin et de recherche scientifique marine. Cette évolution du droit international et les nouvelles responsabilités qui en découlent pour les États côtiers vont être au cœur de la « structuration » de l’AEM à la française et donner naissance à un large « corpus » juridique interne. Pour autant, toute cette architecture n’empêchera pas la multiplication de graves pollutions accidentelles par hydrocarbures à travers le monde, qui amorce une prise de conscience de l’opinion publique sur la nécessaire protection de notre environnement marin.
Aussi, dès 1972, le préfet maritime dont les compétences de police en mer n’avaient pas disparu, avait-il été « réveillé », pour devenir, en situation de crise, l’autorité unique de coordination en mer. Le Gicama (1) était créé, chargé de réfléchir sur ces questions. Les fortunes de mer successives accélérant le mouvement, c’est en mars 1978 que le préfet maritime – devenu par ailleurs autorité « opérationnelle » par ses responsabilités de « commandant de zone maritime » – est conforté dans une place éminente, et permanente, d’autorité de police en mer, doublée d’une responsabilité de coordination de l’ensemble des administrations intervenant en mer (2). Ce décret du 9 mars 1978, relatif à « l’organisation des actions de l’État en mer » est fondateur. Il cristallise la dualité civile et militaire de l’institution du préfet maritime, particulièrement importante puisqu’elle lui confie la plénitude des fonctions régaliennes de sécurité et de défense, avec les moyens correspondants, dans un milieu dont l’unicité, de la côte jusqu’à la haute mer, est reconnue. Par une ironie du sort, ce texte paraît au Journal officiel 5 jours seulement avant l’accident de l’Amoco Cadiz, échoué devant Portsall (Finistère) le 16 mars 1978 avec 220 000 tonnes de pétrole brut à son bord.
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