Malgré une histoire commune féconde, les relations franco-italiennes – de 1945 aux années 1900 – ont été complexes et rarement à la hauteur. Paris a essentiellement privilégié la question allemande, regardant avec un peu de dédain sa cousine romaine. Seuls de Gaulle et Mitterrand surent regarder avec intérêt l’Italie.
Elles s’aimaient comme des sœurs : Les relations franco-italiennes de 1945 aux années 1990
Sisterly Love… Franco-Italian relations from 1945 to the 1990s
Despite a fruitful shared history, Franco-Italian relations from 1945 to the 1990s were complex and rarely up to the task. Paris was mainly concerned with German matters and treated its Roman cousin with a degree of disdain. Only de Gaulle and Mitterrand saw interest in Italy.
Force est de reconnaître que les deux pays n’ont pas toujours été en phase. La France a souvent nourri des arrière-pensées inacceptables pour l’Italie : en particulier la définition d’un rôle privilégié pour la France au sein de l’Alliance atlantique et d’un axe franco-allemand dirigé par Paris en matière européenne. Or l’Italie a toujours recherché, au contraire, l’égalité des droits avec la France, au sein du monde atlantique comme dans le domaine de la construction européenne. Passé la IVe République, pendant laquelle dans l’ensemble les relations ont été bonnes, on ne connut que deux périodes positives, d’abord avec de Gaulle de 1958 à 1962, contrairement peut-être aux idées reçues. En effet, le Général de Gaulle a accordé durant cette période de l’importance aux positions italiennes, et a essayé de gagner Rome à son point de vue. La seconde période pendant laquelle le couple franco-allemand n’étouffa pas les relations franco-italiennes, ce fut sous François Mitterrand, de 1981 à 1995. En dehors de ces deux périodes, force est de constater qu’à quelques exceptions près les rapports franco-italiens après 1958 sont restés limités, voire secondaires, par rapport aux relations que chacun des deux pays nourrissait de son côté avec les États-Unis, l’Allemagne et la Grande-Bretagne.
Des débuts peu engageants
En 1945, Paris considérait l’Italie comme un pays vaincu, alors que depuis l’armistice de septembre 1943 les Italiens s’affirmaient comme « cobelligérants » des Alliés. Par le traité de Paris du 17 février 1947, l’Italie cédait à la France Brigue et le col de Tende (de Gaulle aurait voulu, en outre, annexer le Val d’Aoste). Tout cela ne fut pas bien reçu par l’opinion italienne. L’Italie réussit néanmoins à rétablir rapidement sa situation, grâce à une savante triangulation entre les Anglo-Saxons et la France qui, fort hostile encore en 1945, finit par soutenir Rome contre Belgrade dans la grave crise de Trieste en 1948. En 1950, l’Italie se retrouvait ainsi membre de l’Alliance atlantique, membre fondateur de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), tout en retrouvant un rôle méditerranéen discret mais réel. Les trois mondes entre lesquels se meut l’Italie (atlantique, européen et méditerranéen) se trouvaient ainsi conciliés, grâce à la logique géopolitique de la guerre froide (1).
La IVe République
Néanmoins l’importance du courant démocrate-chrétien dans les deux pays après la guerre ainsi que l’émergence de la guerre froide les poussa à s’entendre. On envisagea même en 1949 une union douanière (2). Cependant, ce que l’on pourrait appeler l’« option latine » fut vite oublié, au profit du couple franco-allemand, couple d’abord économique avant de devenir politico-stratégique.
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