L’avenir de la non-prolifération nucléaire
Est-ce que la non-prolifération a encore un avenir ? Ma réflexion s’inscrit dans une perspective qui n’est pas très optimiste, et qui n’est pas celle en tout cas de Mme Albright, qui déclarait dans un récent article paru dans l’International Herald Tribune qu’il était temps de renouveler la foi dans le TNP ; or si l’on se place dans ce domaine, cela permet certes de tout espérer, mais aussi de redouter le pire. J’articulerai mon exposé en deux volets : le premier sera un bilan de la non-prolifération, le second une réflexion prospective sur celle-ci et l’évolution de la posture des puissances nucléaires à un horizon 2015-2030.
Premier constat concernant la non-prolifération : elle a reçu de rudes coups au cours de ces deux dernières années et surtout de ces derniers mois. On a pu s’apercevoir que la machine commençait à être sérieusement grippée lorsque la Douma a refusé de ratifier Start II, ou plus exactement lorsque l’Administration Eltsine a renoncé à présenter Start II devant la Douma (1). Pourquoi un tel renoncement ? Bien sûr parce que le Parlement russe était, pour une large part, hostile au traité ; mais aussi parce que l’Administration américaine n’a jamais rien fait pour faciliter sa ratification, en se livrant, à chaque fois que le gouvernement russe a manifesté l’intention de soumettre le texte à la Douma, à des actions diplomatiques ou militaires (salve de missiles sur l’Irak, intervention au Kosovo) qui ôtaient à la démarche toute chance de réussite.
Au contentieux sur la ratification de Start II s’est ajouté celui sur les essais nucléaires de l’Inde et du Pakistan en mai 1998. Ce fut là aussi un mauvais coup porté à la diplomatie de non-prolifération, d’autant plus qu’aucun de ces deux États n’a cru bon de faire montre par la suite d’un quelconque repentir. Très rapidement, après des menaces de sanctions, on a fait machine arrière, à l’égard de l’Inde parce qu’on a eu tôt fait de se rendre compte que sa faible insertion dans les mécanismes financiers internationaux ôtait beaucoup de leur efficacité aux sanctions économiques, mais aussi à l’égard du Pakistan, qui a su avec habileté faire valoir que, compte tenu de ses difficultés économiques et de sa position géographique à la conjonction de zones instables, personne n’avait intérêt à courir le risque de le voir plonger dans le chaos ; c’est la raison pour laquelle les États-Unis ont considéré, dès juillet 1998, qu’il était préférable de reprendre l’aide à l’économie pakistanaise un moment suspendue, et cela avec l’accord du FMI.
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