Géopolitique de la mer Noire. Turquie et pays de l'ex-URSS
L’espace régional de la mer Noire, perçu ici uniquement dans sa façade orientale (hors Grèce et Balkans) et n’impliquant donc que la Turquie et les pays de l’ex-URSS, a pris consistance et cohérence surtout à partir de la création, en juin 1992, de la zone de coopération de la mer Noire, sorte d’organisation régionale assez peu structurée vouée à la promotion des échanges régionaux. Pourtant, c’est à un niveau inférieur, infraétatique, que les dynamiques régionales sont apparues les plus actives. Les nouveaux flux, commerciaux, humains, pour ne rien dire des trafics ont été rarement le fait des États de la région, qui ont plutôt donné le sentiment de suivre ce mouvement ; avant de commencer à chercher à le contrôler, voire à s’y substituer.
Cela est dû d’abord au fait que les régions appartenant à la nouvelle Fédération de Russie : Kabardino-Balakarie, Karatchevo-Tcherkessie… ont obtenu le droit de gérer leurs ressources naturelles et d’établir des contacts directs avec l’étranger. Elles n’ont pas manqué de saisir ces occasions, Moscou étant loin. Ce mouvement a été amplifié par l’établissement de liens de coopération entre les différents ports de la mer Noire, on en dénombre près d’une douzaine de quelque poids, dont la privatisation plus ou moins poussée (en Turquie) a suscité l’apparition d’acteurs économiques privés qui ont agi dans une optique régionale. Les mouvements de population : Arméniens de Turquie, Tatars de Crimée, Cosaques… ont donné lieu à de nouveaux brassages qui ont accentué le commerce régional, mais aussi libéré l’action des mafias et permis la prolifération de trafics de toutes sortes : drogue, matières nucléaires, alcool, armes. Différents réseaux religieux, ethniques ou socioculturels (médias, sports…), se sont mis en place favorisant les solidarités régionales et les échanges.
Quatre aspects, développés par les auteurs retiennent particulièrement notre attention : transports et communications, hydrocarbures, respect de l’environnement, sécurité régionale. Cette dernière est loin d’avoir trouvé ses véritables institutions tournant toujours autour de maintes formules : relations bilatérales Russie-Turquie, formule d’une OSCE caucasienne, création d’un axe Ukraine-Turquie-Géorgie-Azerbaïdjan, sans compter les projets plus aléatoires du type création d’« une fédération caucasienne indépendante ».
Voilà plus de clarté dans cette zone stratégique vitale dont on aurait aimé tout de même avoir une description globale : population, richesse, échanges globaux, potentiel de développement. ♦